Oops... Stop. We did it again. ◊ Alix

« Il faut que nous nous mettions d’accord ! » La voix se meurt déjà dans le brouhaha incessant qui règne autour de la table depuis plusieurs minutes déjà. Toi, tu n’écoutes pas vraiment, tu as mieux à faire. La première page de ton bloc note froissé entre tes doigts par l’énervement, ton regard est incapable de le quitter, lui. Tu ne pensais pas le revoir de sitôt, ou pas ici en tout cas mais le destin, ce foutu destin qui te joue des tours ces derniers temps en a décidé autrement. Sa concentration est telle que c’est comme si le monde pouvait s’écrouler à ses pieds sans qu’il ne remarque rien. Tout le monde est là aujourd’hui, tu supposes car tu es encore loin de connaître chaque membre de cette organisation qui t’es chère. Mais lui… lui, ça remonte à plus loin encore que ta prise de pouvoir au sein de l’OBCM. Vous étiez des gamins à l’époque, des ados qui se cherchaient, des ados qui se trouvaient la plupart du temps et si jamais il n’a su tes réelles motivations à le détester, tu ne pouvais pas faire autrement. C’était lui offrir une protection, c’était l’aider sans qu’il n’en ait réellement conscience. Mais quand on s’emploie à ne vraiment pas aimer quelqu’un, on finit juste par y prendre goût et à ne plus savoir discerner le vrai du faux. Le papier toujours froissé entre tes doigts, tu viens en déchirer un petit bout pour le rouler en boule, juste assez grosse pour qu’il la remarque, pas assez pour que d’autre te voit faire. Tu fais celle qui s’étire, et l’air de rien, tu lui lances dessus pour qu’il te prête attention. Tu n’aimes pas être ignorée, tu détestes ça et encore plus quand ça vient de lui il faut croire. Un sourire innocent fleurit sur tes lèvres quand il porte enfin son regard sur toi, jusqu’à ce que cette petite boulette de papier te soit renvoyer et te fasse grimacer. Tu n’as rien sentit c’est évident, c’est plus le geste qui te déplait. Faites ce que je dis mais pas ce que je fais et l’air de rien, tu recommences après avoir griffonné quelque mots sur le nouveau bout de papier. Lui et toi, vous devez parler, lui et toi vous avez des choses à voir sans aucun rapport avec cette réunion de laquelle tu as décroché dès la première seconde. Coupable. Tu devrais probablement l’être mais ça n’est que de la théorie. Tout ce que tu ressens, c’est le besoin de sortir d’ici et de parler en tête à tête. Parler, encore un truc que vous n’avez jamais su faire mais vous avez grandi, ça devrait probablement aller. Toi qui a toujours eu ce talent inné pour vaincre les lois de la probabilité, c’est pas encore gagné, encore moins quand il te renvoit un papier, que tous les regards sont tournés vers vous et que tu ne ressens aucune gêne à avoir été prise sur le fait. Là, on dirait deux adolescent qui s’échange des petits mots pendant les cours. Pour critiquer le prof, le cours, ce qui vous entoure ou simplement vous donner rendez-vous comme c’est le cas en cet instant. Tu entends des murmures, des soupirs aussi. A croire qu’il fallait écouter car c’était important et intéressant, à croire que tu n’as rien d’une bonne conseillère pour te comporter comme une adolescente en pleine crise d’hormones. « Niamh. Alix. Dehors ! » La voix ne s’élève mais elle est ferme et toi, tu hausses juste les épaule comme si ça n’avait pas d’importance et que ton image ne serait pas entachée suite à ça. Tu te contentes de te lever et rassembler tes affaires, juste pour partir devant, juste pour avoir l’avantage.

Plusieurs semaines que j’étais de retours à Bray. J’avais retrouvé mon poste d’assistant social très rapidement. Par contre pour mon siège à l’OBCM, les choses avaient pris plus de temps. Et c’était normal. L’organisation devait s’assurer que je n’avais pas été les trahir, que je n’avais pas vendu d’information sur leur compte pendant mes années d’absence, ou je ne sais quoi encore. Donc, j’avais dû venir plusieurs fois au quartier général pour passer des entretiens et quelques test avant d’être à nouveau admis comme un membre à part entière.

C’était étrange, à présent, je pouvais presque dire que j’avais entièrement retrouvé ma vie d’avant. Seulement, tellement de choses avaient eu lieu. Tellement d’événement, que j’avais l’impression d’être parti pendant des siècles alors qu’en réalité ça ne faisait qu’un an. A ce niveau, ce n’était même plus “rater un épisode”, c’était la saison entière que je n’avais pas vu. Mais il fallait tout de même que je me remette au travail et je ne voulais pas abandonner l’OBCM. Si j’avais rejoint cette organisation, c’était parce que je croyais en leur valeurs. Et faire parti du conseil me permettait d’avoir mon mot à dire au lieu de regarder passivement les citoyens de Bray se faire la guerre.

Ce soir était la première véritable réunion du conseil à laquelle j’assistais depuis mon retour. Je n’étais pas tendu, même étrangement confiant et un peu excité aussi. Comme quoi, tout m’avait vraiment manqué à Bray. Il faut dire aussi, j’aimais avoir des responsabilités, je ne pourrais pas vivre si ce n’était pour me mettre au service des autres d’une façon ou d’une autre. Ainsi, après le travail, j’étais parti pour le quartier général. J’avais laissé une note à Basil pour le prévenir que je resterai tard et qu’il avait juste à réchauffer le dîner qui était dans le frigo. C’était presque à croire que nous étions un vieux couple à vivre ainsi.

J’étais un peu en avance. Ainsi, j’avais pu choisir ma place et discuter un peu avec les personnes présentes en attendant que tout le monde soit là. Ce n’est que lorsque la réunion débuta que je remarquais qui se tenait en face de moi : Niamh Ò Murchù. Elle faisait donc toujours parti du conseil aussi. Je serrais les dents, sa présence ne me réjouissait guère pour beaucoup de raison qui étaient majoritairement des histoires de famille. Tout le monde savait à Bray que les Ò Murchù et les Sweetman n’étaient pas de grand amis. D’après ce qui venait d’être annoncé, apparemment, Niamh aussi était de retour. Comme quoi, c’était vraiment un alignement des astres.

Pour le coup, c’est mal, mais pendant toute la réunion, je n’avais pas pu m’empêcher de m’interroger sur la présence de la brune. Et aussi de ruminer tous les conflits que nous avions pu avoir. Je tentais d’éviter son regard, mais je crois qu’elle avait bien sentis que je l’observait et c’est à ce moment que ce lança un guerre silencieuse, chacun à un bout de la table. Niamh ouvra les hostilités lorsque j’avais la tête tournée pour m’intéresser à la réunion. Une simple boulette de papier. Ok, elle voulait jouer à ça ? Je répliquais de la même façon en essayant de ne pas me faire voir par mes collègues.

Quelques minutes plus tard, la sirène était en train décrire sur un bout de papier qu’elle m’envoya. Elle voulait qu’on parle ? Ca me semblait être une bonne idée. Merde, j’avais l’impression d’être de retour au collège. D’ailleurs, comme au collège, nous finîmes par nous faire virer de la réunion. Génial. Quel retour magistrale Alix. Je me levais, m’excusant auprès des autres conseillers avant de suivre Niamh dans le couloir. J’attendis qu’ils ferment la porte pour soupirer :

- Sérieusement ? Ca ne pouvait pas attendre ? Merci, c’est génial, j’avais vraiment envie de me faire virer de réunion comme un gosse, dès mon premier jour. J’espère vraiment pour toi que ça ne va pas compromettre ma place au conseil.

Oui, je tenais à ma place au conseil de l’OBCM. Je pensais vraiment pouvoir leur être utile et apporter quelque chose à l’organisation. Mais visiblement, tout le monde ne pensait pas de cette façon.

- Qu’est-ce que tu veux ?

Autant être directe. Je n’avais pas envie de passer plus de temps avec la brunette que nécessaire. Quoique, j’avais bien quelques questions à lui poser de mon côté aussi.

Tu es déjà dehor et telle une enfant, tu souris. Le trop plein de fierté qui émane de toi et visible à des kilomètres à la rond mais ça ne fait rien, c’est trop agréable pour que tu décides de changer quoique ce soit. T’es juste une gamine Niamh, tu n’as pas su grandir et passer outre les rivalités peut-être futiles entre vos familles. C’est tellement quelque chose dont tu te fou que tu ne cherches même pas à t’y intéresser plus dans le détails. Alix, tu ne l’aimes pas, tu ne veux pas le voir roder près de ton frère, depuis toujours et à jamais. Trop de non-dit dans cette relation de pseudo haine, à ne pas savoir ce que tu dois dire ou faire quand tu l’as face à toi. Faire semblant est toujours plus facile, une solution de replis et gagnante bien que ça soit aussi agaçant, bien qu’il faille lui adresser la parole. Voilà ce que tu faisais quand vous étiez au lycée, tu subissais sa présence, tu subissais son contact pour le décourager de traîner avec ton jumeau. Tellement facile de fuir la réalité que jamais tu n’as avoué, jamais tu n’avoueras tes réelles motivations dans chacune de tes paroles. Te faire détester, c’était facile, c’était une routine alors pourquoi en changer quand finalement, ça n’était pas si désagréable qu’on pourrait l’imaginer de prime abord. - Sérieusement ? Ca ne pouvait pas attendre ? Merci, c’est génial, j’avais vraiment envie de me faire virer de réunion comme un gosse, dès mon premier jour. J’espère vraiment pour toi que ça ne va pas compromettre ma place au conseil. Qu’est-ce que tu en as à faire toi de ce qu’il peut bien ressentir. C’est peut-être de ta faute si vous vous êtes fait virer de cette réunion mais ça n’est pas pour ça que tu vas t’excuser ou te faire pardonner. Pas dans tes habitudes, tu prends justes ses mots à la légères avec un soulèvement d’épaule et un sourire en coin. « Ca vaaa… je glisserais un mot en ta faveur. Enfin, si j’y pense. » Tu n’as pas de doutes là dessus, tu sais que tu y penseras mais il faut encore que tu veuilles réellement lui rendre ce service pour le faire. Peste jusqu’au bout à chercher la petite bête, la provocation jusqu’à ce que l’étincelle se produise alors que l’électricité est de partout. - Qu’est-ce que tu veux ?  Mais est-ce que seulement, tu veux quelque chose ? Tu n’es pas certaine, ça se pourrait bien. Tu demeures appuyé contre le mur sur lequel tu as mis une option dès ta sortie de la pièce. c’est assez éloigné de la porte, de la salle où tous se trouve pour qu’on ne vous entende pas et que ça reste un minimum privé. « Est-ce que tu es allé voir mon frère ? » Non en fait, tu n’avais rien de spécial à lui dire, tu voulais juste revenir à cette époque où c’était facile de vous détester l’un et l’autre, c’était normal, ça t’a peut-être un peu manqué dans le fond.