Friendship & business are the keys of success

Isleen ∞ Jean-Charly

Je regardais ma montre. Il fallait vraiment que j' accélère le rythme si je ne voulais pas arriver en retard. Je n' aimais déjà pas être retardataire à un rendez vos professionnel mais c' était encore pire quand il s' agissait d' une amie proche. Pour ma défense, j' avais fait un détour à la pâtisserie et je pouvais être à l' heure si je pressais le pas. Je récupérais mes dossiers, fermait l' agence et me décidait à courir. La boutique étant à proximité, il n' était pas nécessaire de prendre la voiture. Mais résultat, j' étais bonne pour faire du sport. Je me mis donc à sprinter, esquivant les gens au passage, jusqu' à atteindre ma destination finale. La boutique de fleurs où travaillait Jean-Charly. J' étais arrivée à l' heure, légèrement essoufflée mais à l' heure. Il fallait préciser que mon rendez-vous avec Jean n' était pas qu' amical. Nous avions évoqué l' idée de travailler en association toutes les deux. J' étais organisatrice de mariage et Jean- Charly, fleuriste. Deux professions qui étaient amenées à souvent être alliées. Les fleurs faisaient parties des cérémonies de mariage. Nous avions donc songées à faire équipe. A faire de la boutique de Jean, le fournisseur officiel en fleurs des mariages que j' organisais. Mais pour cela, nous devions discuter pour voir comment organiser cela pour rendre ça réalisable. D' où ce rendez-vous. Je me décidais donc enfin à franchir le seuil de la boutique.

« Salut Jean. »

Je lui fis la bise afin de la saluer et lui montrait la boîte de pâtisseries que j' avais ramené. Quitte à travailler autant le faire dans de bonnes conditions. Et comme Jean était avant tout mon amie, j' avais pensé que ça aiderait à rendre soin moins formel et stressant que les autres rendez-vous professionnels de ce type. Après tout, travailler en association avec une amie était assez rare pour que nous cassions un peu les codes et la formalité, et afin de passer un début d' après midi en étant plus décontractées. Et on allait pas mentir, la nourriture était un excellent motif de motivation.

« Tu es motivée pour commencer ou on les attaque d' abord? »

Je n' étais pas certaine qu' attaquer de suite la nourriture dès le début était une bonne solution pour rester concentrée, mais il n' empêche que face à de la ganache chocolat, la rationalité n' était pas vraiment de mise. Ce n' était pas pour rien que l' on disait que la gourmandise était un vilain défaut. Et pour ma part, je ne cachais pas que j' étais une faible femme face à du chocolat. Ca allait sans doute me perdre un jour mais tant pis. C' était un péché que j' assumais sans complexe.
Je posais toutefois mes dossiers sur la table, à côté de la boîte, pour ne pas oublier la raison initiale de ma venue et pour éviter un éventuel accident de parcours.

Isleen ∞ Jean-Charly

Jean s'avança vers la porte, saluant son dernier client. Il était bientôt l'heure de fermer la boutique, du moins officiellement. Elle avait rendez-vous avec Isleen, et si elles comptaient parler travail, le fait que des clients rentrent et sortent les empêcheraient d'avancer réellement. Aussi, elle accrocha un mot sur la porte pour annoncer la fermeture exceptionnelle de la boutique. Son amie n'étant pas encore arrivée, la brune en profita pour sortir son téléphone portable et passer un coup de fil à Naël. Elle aimait bien prendre de ses nouvelles de temps à autre, savoir comment il allait, si tout se passait bien. Elle ne savait pas vraiment d'où lui venait cet instinct mais pourquoi pas, après tout ? Pourtant, elle tomba sur le répondeur. Rien de bien affolant, le trentenaire devait être en consultation. Aussi, elle n'insista pas, se contentant de poser l'objet sur le comptoir, devant la caisse. La boutique avait cette odeur entêtante d'un ensemble de parfums que seuls les fleuristes possédaient. Elle ne savait pas vraiment pourquoi les fleurs, pourquoi cet intérêt pour les plantes … Elle n'avait pas réussi à obtenir beaucoup d'informations sur la personne qu'elle était avant son accident mais de ce qu'elle avait pu lire, pas le genre à s'intéresser aux choses … Pures de la vie. Mais ce n'était un secret pour personne qu'elle avait énormément changé. L'amnésie avait eu cet effet là sur elle.

Ses pensées s'interrompirent lorsque la porte de sa boutique pivota. Voyant qu'il s'agissait de celle qu'elle attendait, elle lui fit un grand sourire, avant de lui faire la bise. « Salut Is', comment vas-tu ? » Jean était ce genre de personnes, à toujours s'enquérir de l'état de ses proches, non pas par obligation sociale, mais parce qu'elle s'en souciait réellement. Cette question, pour elle, n'avait rien de banal, aussi, elle la posait régulièrement, écoutant la réponse avec attention. Elle était comme ça, Jean, à s'intéresser aux autres plus qu'à sa propre personne. Voyant la boîte avec laquelle était arrivé Isleen, son sourire s'élargit encore plus. Lorsque l'on commençait à parler pâtisserie, la journée ne pouvait être que bonne. On disait souvent que la gourmandise était un vilain défaut, ce à quoi Jean répondait qu'on pourrait bien faire un régime une fois que l'on serait mort. Régime 100% naturel en plus de ça ! « Je dirais que mon ventre pourrait parler pour moi en disant que je suis multi tâches ! Ou alors on commence à bosser et je t'offre le café comme récompense pour aller avec ? » Encore une chose dont elle ne pouvait réellement se passer, le café. Et le thé. Au caramel, c'était bon le caramel.

Jean désigna une petite table agrémentée de deux chaises du doigt, invitant implicitement son amie à s'y asseoir, avant de passer derrière le comptoir pour récupérer le classeur qu'elle y avait posé un peu plus tôt dans la journée. C'était un classeur d'une taille titanesque, sur lequel était accroché un petit carnet. Il le fallait bien, il s'agissait de son book, qu'elle avait préparé spécialement pour les mariages. Elles avaient décidé de s'allier, avec Isleen qui tenait une agence d'organisation de mariages. Et pour cela, la jeune femme avait bûché des heures durant sur des compositions de fleurs et de plantes, pour le bouquet de la mariée, la décoration intérieure, extérieure, de table, mais également tous les petits détails floraux que l'on pouvait vouloir pour son mariage, pour les demoiselles d'honneur et même à accrocher sur le capot des voitures.   «Je t'ai mis là-dedans toutes mes propositions, j'ai pas mal bûché sur le bouquet de la mariée il doit y avoir une trentaine de modèles. Après je pourrais toujours faire du sur mesure si jamais c'est nécessaire.» Elle s'était, pour le coup, beaucoup amusée à mélanger les fleurs pour faire des bouquets d'à peu près toutes les couleurs, selon l'ambiance de la cérémonie.

Isleen ∞ Jean-Charly

Je souriais en haussant les épaules à la question de Jean. Je savais qu'elle comprendrait que c' était bon signe. Depuis Ailee, je n' arrivais plus à dire à voix haute que j'allais bien. Même si c' était le cas, je me refusais à le dire, comme si j' avais du mal à trouver ça normal. Alors quand on me demandais comment j' allais, j' haussais juste les épaules en souriant genre -oh tu sais...- et les proches comme ma famille ou Jean comprenaient.

« Et toi comment tu vas? »

Je posais rarement la question en tant que formule de politesse. Je craignais toujours que la personne en face de moi ne soit tenté de mentir pour ne pas avoir à se révéler alors qu' il n'en avait pas envie. Alors quand je posais la question, c' était toujours à mes proches, me doutant qu' ils auraient moins de mal à me dire la vérité ou moins de scrupules à ne pas répondre. Encore plus pour Jean et moi qui nous étions rencontrées chez le psy, alors que nous étions au plus mal. Nous ne connaissions certes pas tout de l'autre mais nous savions que nous étions mutuellement vulnérables sur certains sujets. C' était l' une des raisons pour laquelle j'avais confiance en Jean.
Mon regard s' illumina quand Jean évoqua le café. J' étais une droguée de cette boisson chaude. J' avais besoin de caféine comme un junkie avait besoin de drogue.

« Si tu me prends par les sentiments... »

Je ne pouvais pas lutter face à une telle proposition. Parler organisation de mariage en alliant café et pâtisseries, on ne pouvait qu' être motivées. J' acquiessais donc d' un signe de tête et m' installait sur cette table qui allait être notre base d' opération pour l' après midi.
Je récupérais le book que me tendis Jean et commençais à le consulter. Les bouquets étaient magnifiques. Les compositions proposées étaient variées et offraient déjà un large panel de choix qui pourrait s' adapter à diverses styles. Et savoir que Jean proposait également une possibilité de su-mesure était une excellente chose. Certains couples aimaient avoir des bouquets et décorations florales personnalisées et assorties à leur thème. Et en matière de thèmes, certains faisaient vraiment dans l' originalité. Et j'utilisais ce terme dans le sens poli et de la neutralité professionnelle. Le book offrait également des possibilités comme la boutonnière pour le mari par exemple. Tous ne les utilisaient pas mais là encore c' était une bonne chose que Jean propose ce genre d' options. En tout cas, elle avait sacrément bûché elle aussi et ça se voyait.

« J'aime beaucoup. Les bouquets permettent de s' adapter à pas mal de style. Et si pour les autres plus "typiques" il est possible de faire du su mesure, c'est parfait. Et c'est bien que tu proposes les dérivés comme les boutonnières, les compositions florales pour la décoration par exemple. Il faut souvent jongler avec plusieurs fleuristes pour avoir le tout, si tu offre la possibilité de tout avoir avec ta boutique, ça ne pourra que simplifier les choses et te permettre de mettre en place des forfaits et que les mariés te fasse ensuite de la pub par bouche à oreille. Ils adorent l' idée de tout avoir à un même endroit. Ca leur fait un stress en moins de se dire que du coup ils auront tout en place le même jour. Et ce même si ils passent par moi pour organiser... Ca pourrait tout à fait s' adapter à pas mal de mariages. »

A mon tout je récupérais et mes affaires et en sortit un book. Dedans se trouvait des photos de ce qui avaient été fait comme mariages. Chaque page regroupait des photos de la salle, de la robe de mariée, des mariés le jour J mais également de toute ce qui fait la clé des cérémonies comme le lieu, la pièce montée...Tout ce qui faisait ressortir l' atmosphère du mariage. Le book n' était un panel mais cela permettait de voir que les styles pouvaient aussi bien aller du classique, au traditionnel oriental, du mariage gothique, en passant au mariage axée sur une période de l' histoire, au mariage "campagnard" où les fleurs avaient vraiment un fort rôle à jouer. Il y avait même un mariage sur le thème de Stars Wars où la mariée était en princesse Leïa. Oui, il y avait vraiment de tout.Quand je vis Jean tomber sur ce dernier, j'eus un petit sourire amusée.

« J' avais jamais vu de pièce montée en forme de R2D2 avant ce jour là. »

Et j' espérais ne plus avoir à en revoir. En revoyant les photos, je me souvenais des exigences des mariés et j'avais dû visionner la saga pour pouvoir comprendre et respecter leur attente. Dieu merci, on avait évité les témoins en tenues de Chewbacca.

Isleen ∞ Jean-Charly

La jeune femme haussa les épaules à la question que posa la Rosenberg. Cette dernière n'insista pas, elle ne savait que trop bien dans quel enfer son amie avait vécu ces dix dernières années. Elle, elle avait perdu toute sa vie mais ne s'en souvenait pas. Isleen, elle, aurait sans doute souhaité ne pas s'en souvenir. Mais la voir sourire était suffisant pour que Jean comprenne. Elle allait bien mais ... Il y aurait toujours un mais quelque part, c'était le cas chez tous ceux qui avaient subi un traumatisme. C'était normal. Jean va bien mais elle a perdu son identité et a du mal à la retrouver. Naël va bien mais il est malade et a perdu l'amour de sa vie. Isleen va bien mais sa soeur ne reviendra pas pour autant. C'était alarmant comme cette ville regorgeait d'esprits brisés. Mais il fallait bien faire comme si, alors Jean sourit. Ses sourires étaient toujours sincères, il paraissait évident que s'il fallait commencer à aller mieux, sourire en était l'ingrédient secret. " Oh ça va ! Mes recherches avancent, quoique lentement, donc je suis plutôt contente." Ce n'était un secret pour personne, surtout pas ses amis, que Jean recherchait inlassablement des traces de son passé. Elle avait mis un an et demi avant de vouloir le faire, ayant besoin de temps pour se trouver elle-même avant de chercher des réponses. S'en était suivi un moment où elle n'avait pas su par où commencer et maintenant ... Il y avait cet homme dans le coma avec qui elle était lors de l'accident sans savoir ce qu'il représentait pour celle qu'elle était alors. Oui ça avançait, mais sans doute pas assez vite ...

Mais ce n'était pas le propos de la journée, aussi Jean balaya ces pensées du revers de la main avant d'aller chercher son fameux classeur derrière le comptoir et de retourner autour de la table qui leur servirait de bureau pour l'après-midi. Elle acquiesça aux commentaires d'Isleen. Elle avait vraiment fait en sorte que les potentiels clients puissent être satisfaits et comblés sur un large choix. Elle n'avait elle-même jamais été contrainte de planifier son mariage, du moins à son humble avis, mais ça semblait être une prise de tête sans fin et les crises d'angoisse devaient être légion lorsque l'on était sur le point de se marier. Aussi, elle avait tenté de proposer assez pour que l'arrangement floral ne soit plus un problème pour les futurs mariés. Il fallait dire qu'elle y avait pris énormément de plaisir également, le mariage symbolisait un nouvel espoir et elle trouvait cette cérémonie particulièrement belle et pleine de sens. Elle-même rêvait d'un beau mariage lorsque son temps serait venu ... Sans oser mettre de nom sur le visage de celui qu'elle se verrait bien épouser, elle n'était pas dupe quant à ses espoirs. " Je suis contente que ça te convienne ! Pour le sur-mesure c'est faisable également, je me doute que tous les couples qui viennent te voir n'ont pas la même idée sur ce qu'est leur mariage de rêve, je me suis dit que ça pourrait aider. "

Isleen ne tarda pas à sortir son propre book, et Jean commença à le feuilleter. Il y avait globalement de tout et ... N'importe quoi. Des mariages de princesse qui feraient rêver n'importe qui, des mariages que l'on pourrait qualifier de légèrement 'hippies' même si la Rosenberg adorait personnellement ce style là et des mariages totalement geeks. C'est d'ailleurs sur les photographies du mariage Star Wars qu'elle s'arrêta, un grand sourire aux lèvres. "Oh mon Dieu, c'est tout bonnement impressionnant." Marquant une pause, elle continua d'observer les photos. "Un peu perturbant, mais impressionnant !" Certains avaient une idée bien prédéfinie et bien étrange de leur mariage, mais après tout, s'ils étaient heureux ainsi, Jean n'y voyait pas le mal. " Je suis certaine de pouvoir faire une tête de Yoda avec des hellébores sauvages !" Et beaucoup beaucoup de travail. Mais heureusement, pour le moment, ce n'était pas encore à l'ordre du jour, ou alors Isleen avait oublié de le mentionner.

Isleen ∞ Jean-Charly

J' étais rassurée de savoir que Jean allait assez bien et qu'elle allait peut être enfin avoir un début de réponse à ses questions. Si il m' arrivait souvent de vouloir oublier, je me doutais aussi à quel point cela devait être dur pour Jean de vivre en ignorant quasiment tout d' elle même. Et je partageais avec elle le besoin d' avoir des réponses à certaines questions. Les interrogations différaient mais nous avions la même frustration. Alors c' était une bonne chose qu'elle ait enfin un début de piste. Et j' espérais pour elle que ce serait concluant pour l' aider à reconstruire progressivement. Mais tout comme j' étais d' évoquer Ailee, Jean semblait avoir du mal à évoquer son amnésie. Nous sommes donc passées au sujet du travail. Un sujet neutre et la raison de mon venue cette après midi.
Nous étudions nos books respectifs, et plus je regardais son travail, plus j' étais certaine que l' idée d' associer nos métiers était excellente. Cela ne pouvais être que positif, d' autant plus que Jean était une amie et une personne de confiance. Cela allait simplifier la relation professionnelle. Sa remarque sur le mariage geek me fit rire.

« J'ai eu la même réaction que toi. Mais crois moi, j'ai déjà vu plus excentrique. Certains par comportement de groupie pour un domaine, d' autres juste pour vouloir se différencier. »

Les mariés pouvaient être dur à comprendre. Mais c' était mon métier de les analyser pour cerner leurs envies et leurs besoins. Un mariage était sensé être le plus beau jour de leur vie et un moment unique. Alors, oui, maintenant l' aspect "mariés pour la vie" se faisait rare. Il m' était même arrivée de devoir organiser le mariage pour un couple dont j' avais organisé leur précédent mariage à peine un an avant...Mais je n' allais pas juger. Déjà parce que n' ayant pas choisi mon mari, je ne pouvais pas comparer. Et en plus, qui disait deux mariages, disait plus de boulot et donc d' argent pour moi. Je n'allais pas cracher sur la clientèle fidèle à leur organisatrice à défaut d' être fidèle à leur moitié amoureuse.

« Et si tu peux faire Yoda avec des fleurs, je crois que tu pourras tout faire, dans ce cas. »

Si Jean pouvait survivre à des fans de star wars, elle survivrait à tout. J'en étais certaine. En tout cas, je la savais tout à fait compétente pour réussir à répondre aux envies, parfois même aux caprices, de certains mariés assez spéciaux et exigeants. Et puis, je resterais le lien entre les deux, elle n' aurait pas à les rencontre ou alors pas seule. C' était mon métier de lier les deux et de faire tampon entre les délires de certains et la réalité.

« Et tu souhaiterais partir sur des forfaits ou sur du barême -à la carte ? »

Oui je devais poser la question. L' aspect financier restait nécessaire et j' avais besoin de savoir pour avoir toutes les cartes en main pour mes clients. Et je ne voulais pas non plus que Jean se retrouve lésée. Surtout que les fleurs était un chantier important quand il s' agissait de mariage. Et certaines périodes de l' année étaient prisées pour se marier, ce qui signifiait des périodes avec beaucoup de boulot.

Isleen ∞ Jean-Charly

Jean ne se considérait pas comme malheureuse. Dans sa détresse, elle réalisait qu'elle avait eu énormément de chance. Elle n'avait pas à chercher très loin, en réalité: cet homme, Jack, avait eu le même accident qu'elle et trois ans plus tard n'était pas sorti du coma. Personne ne savait s'il en sortirait un jour ou si cette absence aurait des séquelles sur ses capacités. Ce n'était un sort qu'elle n'enviait à personne. Certes perdre la mémoire n'était pas une expérience agréable, ne pas savoir qui l'on était, où l'on allait lorsque le destin nous avait frappé ... Mais ce n'était rien comparé à d'autres malheurs. Elle avait gardé la vie alors que d'autres ce jour-là l'avait perdue, elle avait même trouvé Naël et une stabilité de vie qu'elle n'avait sans aucun doute jamais connu auparavant. Alors bien entendu qu'elle voulait des réponses, mais elle n'en avait pas besoin comme si c'était vital pour elle de connaître son passé. Bien entendu, c'était sa pensée maintenant. Les choses étaient bien différentes lors de ses crises, lorsqu'elle ne savait plus quelle personnalité adopter et qu'elle se renfermait, au point de sauter à la gorge de tous ceux osant l'approcher. Heureusement, ces moments se faisaient assez rares.

La jeune femme continua d'observer le book de sa toute nouvelle partenaire. Oui, pas de doutes, elle adorait les mariages. Tout ce qui symbolisait la pureté et l'amour, tout ce dont elle rêvait dans une seule cérémonie. C'était donc avec plaisir qu'elle aidait. " Parfois, l'excentricité a du bon ... Bon, pas dans tous les cas, je te l'accorde !" Elle venait de tomber sur une photo de mariage où ils avaient tous l'air issus de créatures de la forêt, ce qui semblait pour le moins étrange. On pouvait dire tout ce que l'on voulait sur " tant qu'ils sont heureux c'est le principal", l'envie forte de jugement ne partait pas vraiment au premier battement de cils.

La jeune femme se mit à sourire. Elle était assez d'accord avec son amie pour le coup. " Je suis la reine des fleurs, je peux tout faire voyons !" Bah voyons. Mais elle était créative, elle pouvait trouver des solutions pour à peu près tout. Enfin, tant que ça restait humainement réalisable, elle ne faisait pas de miracles. Jean prit quelques secondes pour réfléchir à la question d'Isleen. Elle n'allait pas se mentir, elle y avait déjà songé, c'est pourquoi la réponse ne lui fût pas trop difficile à sortir. " A la carte serait mieux, certains choix demanderont plus de moyens que d'autres."

Isleen ∞ Jean-Charly

Parfois du bon, l'excentricité? Je fis une moue pas totalement convaincue. Dans la vie de tout les jours certes. Dans nos métiers, je n' étais pas sûre. On aimait rarement les contrariétés de planning dans nos genre de professions. Jean avait peut être cette chance que si un type de fleurs manquait, elle pourrait toujours s' adapter en remplaçant avec une autre plus ou moins similaire. Mais dans mon cas, contrariété de planning rimait avec retard potentiellement couplé avec le stress des futurs mariés.

« Oui enfin du bon... Pour les clients. Parce que j' ai envie de dire, c'est reposant le classique. On peut s' organiser et surtout ne pas risquer de crises cardiaques en entendant ce que la mariée a eu comme illumination dans la nuit... »

J' étais encore "traumatisée" par les envies soudaines que certaines de mes clientes avaient pu développer en une nuit concernant leur déco. Et d' essayer de leur expliquer que non, le restaurant n' accepterait pas une fresque sur leur mur représentant la station de ski où son mari et elle s' étaient rencontrés. Ou que oui, leur thème était la jungle, mais que non ce n' était pas possible de faire venir un singe du zoo pour que la déco fasse plus authentique. Et ça, c' était les lubies les moins pires dans le tordu. Je comprenais l'envie d' excentricité de certains couples mais l' organisatrice de mariage organisée que j' étais, détestait ça. Je pouvais le faire. Mais si on pouvait ne pas avoir à le faire, ça j' adorais.
Je riais à sa remarque. Moi aussi je pouvais tout faire. J' avais survécu à un mariage Star Wars, j' avais survécu à mariage médiéval, j' avais même survécu à mon propre mariage. Quoique... Mais Jean et moi étions des professionnelles. On savait ce qu' on faisait. Parfois même, après coup, on ne savait pas comment on avait fait. En tout cas, je lui faisais confiance, elle pourrait totalement gérer, ça j'en était certaine.

« Ok. Faudra juste du coup prévoir un barême de prix de base pour que les clients puissent rapidement visualiser ce que ça coutera. »

Il était vrai qu' à la carte serait plus simple à gérer mais également plus avantageux pour Jean. Les forfaits étaient souvent comme les menus au restaurant. On les prenait car ça paraissait moins cher mais y' avait toujours un moment où on prenait un extra à la carte et au final ça revenait plus cher. Alors qu' à la carte, ça semblait plus cher mais si on choisissait le vrai nécessaire, les deux parties trouvaient leur compte. Ah les joies du commerce...
En attendant, on commençait à entrevoir comme allait s' établir ce partenariat et ça promettait du lourd.

« Mais au moins, on a confirmation de la compatibilité de l' association. Je suis sûre qu' à nous deux, on va pouvoir organiser ça parfaitement. »

Entre sa créativité et mon organisation, il y avait de fortes chances que ça crée une complémentarité et qu' on puisse rapidement trouver un moyen efficace de mettre ça en place. Si juste qu' à présent c' était pour nous une idée et une envie de collaborer, je commençais maintenant à entrevoir comment nos deux professions pourraient une fois lancée, être efficace et positif pour Jean et moi. J' espérais que Jean arrivait elle aussi à percevoir ça.