You jump, I jump. Remember ? ◊ Castiel

Bray. La ville qui t’a vu grandir, la ville qui t’a vu changer aussi et qui aujourd’hui, va te devoir te donner de nouveau un foyer. C’était il y a longtemps la dernière fois que tu t’es trouvée ici, que ton regard a pu parcourir la beauté de cette ville qui finalement, t’as un petit peu trop manqué. Tout est à porté de main, il te suffit de la tendre pour posséder ce qui te revient, ce qui t’appartient et que tu as renié pour faire ce qui te chantait. Un mal pour un bien peut-etre, si tu n’étais pas parti, tu n’aurais peut-être jamais su apprécier de nouveau les plaisirs simples de la ville de Bray et de ce que ses habitants ont à t’offrir. Ou peut-être est-ce toi qui leur offre quelque chose par ta reprise du Drunk Mermaid ? Ce bar que tu as acheté en compagnie de ton frère, faisant de vous des co-propriétaire. Mais toi, toi tu as fuit, tu es partie en le laissant seul pour gérer cette affaire. Un soupir traverse tes lèvres quand tu regardes le paysage défiler devant tes yeux. Tu n’as pas forcément le moral quand dans ton esprit tu sais pertinemment où tu te rends. La prison, c’est pas le lieu rêvé pour un retour, c’est pas là que tu espérais un  jour faire tes retrouvailles avec ton double le jour où tu reviendrais en ville. Tu te permets même un rire, te fichant un peu de qui se trouve à côté de toi, bien trop plongé dans tes pensées. Est-ce que tu regrettes ton départ ? Tu pourrais presque t’attendre à recevoir cette question de la part de Castiel. Pourquoi es-tu parti ? Tu le vois demander, s’être demandé ça depuis le départ alors que la seule à posséder un semblant de réponse et qui t’avait fait juré de ne jamais rien dire était votre petite soeur, Phoebe. Quand la prison se dévoile sous ton regard, il faut te rendre à l’évidence, tu ne peux plus revenir en arrière, c’est trop tard maintenant. Tu n’es jamais venue par ici par le passé, tu t’en souviendrais très probablement au vu de l’ambiance qui y règne. Et puis, qu’est-ce qu’une enfant aurait bien pu faire en ses lieux ? Rendre visite à un parent mais toi, les tiens étaient bien trop droits dans leurs bottes. Tu es même convaincue que s’ils avaient eu quelque chose à se reprocher, dû finir dans un tel endroit, ils auraient tout fait, l’un comme l’autre pour que ça n’arrive pas. Le nom et la réputation avant tout le reste comme on te l’a toujours dit et répété. Quand la voiture s’arrête, tu demeures dans ta bulle, déjà à l’extérieur à profiter des quelques rayons du soleil et de cet air frais. C’est agréable avant d’aller t’enfermer dans tu ne sais pas exactement quel endroit. Il le faut pourtant et tel un automate, tes pas te mènent à l’intérieur. C’est bien trop sécurisé, ça t’empêche de comprendre ce qu’on reproche vraiment à ton frère. Est-ce bien nécessaire tout cela ou est-ce juste là pour impressionner les visiteurs et leur déconseiller de se retrouver entres ces quatre murs à un jour ? Tu te sens comme une étrange, regardée par des personnes tous plus hors normes les uns que les autres. Tu attends, assise derrière une vitre, un téléphone sur ta droite. Tu attends que celui que tu es venu voir arrive enfin. Il est méconnaissable, ou peut-être que tu ne veux voir que ce qui t’arrange, tu voudrais culpabiliser d’être parti et de l’avoir laissé, de ne pas être revenu pour l’enterrement de Nathan et de les avoir tous laisser subir ça sans toi. Alors tu préfères le voir dans un mauvais état, aussi véridique soit cette information. « Bonjour Castiel. » Ta voix est légèrement rauque, l’effet de l’émotion sans doutes. Mais tu ne pleures pas pour autant Niamh, tu ne pleures pas parce que tu ne sais pas faire, tu n’as jamais été très douée pour montrer tes réels sentiments quand bien même ils sont présents, en toi. Ton regard se porte sur tes mains que tu viens croiser devant toi, tu as du mal à le regarder directement, peut-être que finalement, la culpabilité pointe son nez. « Comment tu te sens ? » Un peu idiot sans doute de demander cela alors que vous êtes dans une prison et qu’il est celui vêtu de l’habit des prisonnier. Mais tu as besoin de savoir, tu as comme besoin d’être certaine qu’il va bien, qu’il voulait vraiment de toi ici.

Si tu avais déjà une tête horrible lorsque Basil est venu te rendre visite, il y a de cela quelques mois, ce n’est relativement rien par rapport à la dégaine que tu arbores aujourd’hui. Dormir entre trois et quatre heures par nuit et jamais vraiment paisiblement a eu raison de ton port de tête et de ton ancienne présentation impeccable, et tu traînes des pieds comme si tout ton corps te faisait souffrir alors que tu te diriges vers le parloir. T’as perdu l’envie de vivre, Castiel, déjà qu’elle s’amenuisait encore et encore au fur et à mesure que tous ceux autour de toi te quittaient, on peut dire que la seule chose qui te fait encore tenir debout par un quelconque miracle est de savoir que tu finiras probablement par traîner définitivement le nom des Ò Murchù dans la boue, et que ton enfant aura au moins quelque chose dont il puisse être fier, s’il arrivait un jour à accepter le fait que son père était un meurtrier. Mais malgré toutes les belles paroles que tu lançais à Anthéa toutes les semaines, pour ne pas l’effrayer, ne pas la stresser, tu étais intimement persuadé que tu ne tiendrais pas dix ans dans cette prison, alors que la moitié des détenus avaient déjà fait promettre de te trancher la gorge. T’en as plus pour très longtemps, Cas, tu le sais, et c’est peut-être pour ça que t’as accepté cette demande de visite. Peut-être que dans une autre situation, avec un avenir un peu plus certain, t’aurais réfléchi, t’aurais refusé. T’as pas besoin qu’on te rappelle ce que t’as fait, qu’on te regarde encore avec des yeux de merlan frits en te demandant si c’était vraiment un accident, t’as pas besoin de ça, pas la force d’insister encore que non, t’aurais jamais pu faire de mal à Nathan, même si la plupart du temps, c’était un petit con. Mais t’as déjà traversé ça avec Alexis, Anthéa et les deux Josh. Ce n’est pas comme si tu pouvais prouver quoique ce soit, y a que Hécate qui sait réellement, que Hécate qui comprend, qui a mal mais qui comprend. Mais c’est parce qu’elle était là, elle a vu de ses yeux l’accident et ce cauchemar qui te hante encore de voir le corps de ton frère inanimé au sol, toi qui te jette dessus en tentant de le réveiller sans plus de succès qu’attendu. Mais en fin de compte, ça a beau avoir été un accident, t’as pas d’excuse, pas vraiment. Et t’en peux plus d’être regardé comme un monstre. T’as beau être sorti de ce déni, de cette froideur qui avait gelé le moindre sentiment que tu pouvais ressentir, tu ne nieras pas qu’il était question de survivre plus que d’un choix. Suivre ton père parce qu’il était le seul à avoir été là au moment où t’en avais le plus besoin. Toi qui donnait tout pour ta famille, pour tes amis, eux qui t’avaient laissé sans même se donner la peine de t’envoyer ne serait-ce qu’un message. T’as eu la rage contre Alexis, tu pensais ne jamais pouvoir la pardonner et pourtant, c’était le plus facile. Elle t’est vitale, Alex, celle qui a toujours vu ta noirceur mais qui a tenté de l’éviter, de la faire disparaître. En fin de compte, ça n’a jamais été à elle de la surveiller, de la faire fuir. Et sans doute que c’est à cause de toi, en partie, qu’elle s’est barrée à l’autre bout du monde, parce qu’elle a jamais eu besoin de ça. Mais Niamh … Niamh c’est une autre histoire. Niamh c’est ta soeur jumelle, le lien indéfectible, la seule véritable pour qui tu pourrais mourir sans vraiment le regretter, et sans doute celle qui a fait naître en toi le plus de colère alors que t’essayais de comprendre pour quelle raison tous ceux que t’aimais finissaient par te quitter en pensant que c’était pas si grave. Ta faute, la leur, en t’asseyant, t’as toujours le goût amer de l’abandon, alors que tu sais pertinemment bien que t’es mal placé pour avoir de la rancoeur. Mais la seule liberté qu’il te reste, c’est bien celle de tes sentiments, alors tu t’en priveras pas non plus. “ Niamh.” Tu te retiens beaucoup trop de commencer maintenant à être désagréable, pas parce que t’as vraiment envie de l’envoyer chier, mais surtout parce que ce sera mieux que ce silence qui commence déjà à te mettre mal  à l’aise. “ Il faut vraiment arrêter de me poser cette question.” Le plus horrible à ton sens, reste que tu es persuadé qu’à l’extérieur, Anthéa ou Hécate lui aura bien fait un compte rendu de la situation, à savoir de ton état plus que déplorable. Pas Phoebe, puisqu’elle refuse encore de venir te voir, ou même de répondre à tes lettres, pour ce que ça change. Non pas que tu puisses lui en vouloir. “ Comment va le TDM? Josh s’en sort?” Malgré tout ce qu’il y aurait à dire mais que tu n’oses pas aborder, t’as décidé de t’enquérir sur ton business. Sans doute le moins risqué, la question qui peut te donner l’impression que quelque part, au fond, t’es encore humain et pas juste un animal en cage. T’as confiance en Joshua. ça faisait quelques temps que tu le formais pour s’occuper de l’administration du bar en plus de ses talents de barman, mais c’est pas comme si tu pouvais vraiment surveiller ses faits et gestes. Maintenant que Niamh était là, ce serait une autre histoire. “ Je pensais pas que tu viendrais.” Ici, à la prison ou bien à Bray, honnêtement, t’avais même abandonné l’espoir qu’elle s’en soucie.

“ Niamh.” Un frisson parcourt tout ton corps quand tu entends la voix de ton frère. Ca faisait longtemps, trop longtemps sans doutes mais c’est entièrement de ta faute et ça, tu en as conscience. Mais ce ton qu’il emploie, tu le mets sur la faute de l’enfermement, sur cette situation qui t’échappe et qui ne doit pas être facile pour lui. Comprendre, essayer en tout cas, c’est tout ce que tu peux faire et tu tentes du mieux possible, de ne pas te montrer inquiète ou accusatrice, tu n’as pas le droit tant que tu ne sais pas. Alors tu demandes Niamh, la première chose qui te passe par la tête, savoir comment il se sent, comment il va alors que pour parler à quelqu’un, il y a désormais une vitre qui l’en sépare. “ Il faut vraiment arrêter de me poser cette question.” C’est toi qui soupires maintenant, il ne te répondra pas, il te faudra te contenter de ce que tu peux voir et de ce que tu seras capable de comprendre, simplement en l’observant. Tu n’es pas revenue pour rien, tu ne comptes pas te tourner les pouces derrière ton bar en attendant que les choses se fassent par elle même. Une solution, ça serait bien et beau si ce genre de choses apparaissaient rien qu’en un claquement de doigts. Mais, tu essayes juste de garder ton calme et ton sang-froid. Quand tu es partis, tu savais que les choses ne seraient simple pour personne. Tu l’as fait un peu en lâche, pensant que c’était la meilleure solution pour tout le monde que de t’éloigner de Bray pour un temps. Et puis il faut dire que tu y as pris goût à l’aventure, au voyage que tu n’aurais jamais cru possible avant. Depuis toujours, ta vie était programmé à la seconde prêt, jusqu’à ton mariage avec un homme dont tu ne savais rien et pour qui tu n’éprouvais rien. Tu détestais ça mais toujours, tu as gardé le silence, jusqu’au jour J. Ce jour là, tu as eu comme une révélation, il était temps de mettre un terme à cette vie faites de compromis et qui n’était finalement pas la tienne. A croire que ton père vivait par procuration au travers toi. C’était lui qui décidait et tu as finis par dire non une première fois. Chose que tu as recommencé après avoir failli mourir dans cette voiture par défaut de frein, là c’était le moment ou jamais et tu l’as fait, tu as sauté le pas. “ Comment va le TDM? Josh s’en sort?” le bar; ça te ramène à la réalité des choses et ton regard vide se fait plus précis, posé sur ton frère. « Ca va, il a bien géré les choses en attendant que j’arrive. » Tu ne veux pas qu’il se fasse de soucis pour ça, il a sans doutes mieux à faire. Et puis tu ne mens pas, tout est sous contrôle jusqu’à maintenant. Tu n’es pas la plus expérimenté dans le domaine, tu n’as jamais vraiment eu le temps de le tenir ce bar, d’en être réellement la co-propriétaire et pourtant, tu es là, tu es venue comme il le voulait, comme on te l’a demandé et tu espères que ça suffira pour le moment. « Il m’aide à comprendre un peu tout, à devenir la patronne en ton absence. » Juste une absence, c’est pas définitif, tu le sais ou tu l’espères en tout cas. Peut-être que tu es un peu trop rêveuse et optimiste sur ce coup-la Niamh mais ça fait du bien parfois de voir les choses du bon côté. “ Je pensais pas que tu viendrais.” Tu hausses les épaules, personne ne s’attendait à ce retour si inopiné, personne ne pouvait deviner que tu reviendrais et que tu essayerais du mieux possible de réparer les choses, de faire comme si tu n’étais jamais partie. Tu es plutôt douée pour ça d’ailleurs. « Je ne devais pas revenir. Ma destination, c’était Osaka si mes souvenirs son bon, j’ai d’ailleurs toujours les billets. » Tu voudrais rire, tu te contentes de sourire pour paraître un minimum discrète alors que vous n’êtes pas seuls. Jamais seuls, sans surveillance dans une prison, il va falloir t’y faire à cette façon de vivre. « Anthéa m’a contacté, elle a trouvé mon numéro dans tes affaires je suppose et elle m’a dit qu’il y avait une urgence, que je devais rentrer parce que le TDM avait besoin de moi. » Tu laisses se passer un temps, quelques secondes tout au plus sans le perdre du regard. « Elle a dit que tu avais besoin de moi. » Ce n’est pas vraiment la vérité mais il n’a pas besoin de le savoir. Tout ce qui compte, c’est qu’il sache que tu es revenue pour lui, tu es revenue parce que tu avais besoin de savoir, tu avais besoin de réponses que lui seul pourrait te fournir. « Que s’est-t-il passé Castiel ? Pourquoi tu es ici ? Pourquoi on te traite comme si tu étais le pire des criminels ? » Parce que c’est ainsi que tu vois les choses, c’est comme ça que sous tes yeux, ton frère paraît et c’est loin de te plaire.

Tu sais que ta réaction, elle peut paraître injuste. Tu as réussi à pardonner à Alexis, alors pourquoi pas à Niamh? Pourtant, la situation est similaire. L’une est partie pour s’enfuir de l’emprise de Bray, l’autre de Gidéon. Peut-être parce que Niamh a fait ce que tu as toujours lutté pour ne pas faire. Quand elle a quitté le mariage, provoquant un esclandre dont la famille a eu du mal à se remettre, elle a fermé la seule porte que tu avais. A ce moment-là, tu ne pouvais plus y échapper. Peut-être un peu de rancoeur, de jalousie aussi, pour avoir vécu une vie libre alors que toi tu n’en as jamais eu l’occasion même si tu l’as longtemps rêvée. Mais ce n’était pas la faute de ta jumelle si Margot était partie, ou avait été enlevée, ou peut importe ce qui avait pu lui arriver pour qu’elle devienne la psychopathe qui avait failli tuer Anthéa. Et ce qu’il s’était passé avec Nathan n’était pas non plus de son fait, ni même de la faute d’Alexis de ne pas avoir été là pour limiter les dégâts. Aucune des deux n’aurait pu éviter l’accident, et si tu aurais peut-être - et c’était un gros peut-être - pris responsabilité avant, tu les aurais sans doute perdues toutes les deux par ton comportement. Parce que tu avais voulu te conserver mais tu avais perdu momentanément ta part d’humanité, et quelque part, tu le sais, tu es soulagé qu’aucune des femmes les plus importantes de ta vie n’aient eu à subir ce changement. Pour ta défense, le fait que Niamh est attendu plusieurs mois pour venir te voir en prison était aussi quelque chose que tu vivais mal, mais ce n’est pas vraiment contre elle que tu en as. Tu te doutes qu’elle a dû peser le pour et le contre, tenter de comprendre ce qui avait bien pu se passer pendant son absence pour que tu en sois arrivé à une telle extrémité, que ta vie se soit détruite aussi vite qu’elle s’était construite. Elle avait dû faire le deuil de Nathan des années après sa mort. Pour être honnête, tu aurais été sans doute moins surpris si elle n’était pas venue du tout, comme Phoebe. Tu t’es enfermé dans des mensonges et peu à peu, sans doute que tu les avais cru. Mais si tu as eu des années, même inconsciemment, pour te rendre compte que Nathan ne reviendrait pas, eux n’ont eu qu’une poignée de semaines. Alors peut-être que ton ton, sec et peu avenant, il valait plus pour toi et pour la position dans laquelle tu avais mise ta famille entière. Hécate, obligée de mentir, Phoebe, arrachée de sa moitié et ton nom traîné dans la boue, même si pour cette dernière chose, on peut dire que tu en étais plus fier que dérangé. Il est bien plus facile de parler d’un sujet neutre après des années sans se voir. Tu ne veux pas admettre qu’elle t’a manqué, pas tout de suite, en tout cas, alors que tu sais que ce que vous aviez comme relation presque votre vie entière est probablement terminé. Alors tu enchaines directement sur le bar, la seule connexion qui semble vous rester pour le moment. Tu hoches la tête, silencieusement. “ Il fait du bon boulot en général.” Tu l’as formé pour, il faut dire, à partir du moment où t’as su ce que t’allais faire, ce qu’il fallait que tu fasses, t’as fait en sorte de pas perdre la seule chose qui était à toi, à savoir le TDM. Même si tu sais bien qu’il faudrait un miracle pour que tu retournes à sa tête un jour, proche ou lointain. Mais tu n’en dis rien. Parce que tu ne veux pas non plus lui enlever l’espoir qu’elle semble avoir pour vous deux. Tu souris, pour la première fois depuis que tu l’as vue assise là. Triste tableau. “ Désolé de t’avoir coupée dans ton tour du monde. Je t’aurais bien rejoint mais je suis un peu bloqué ici pour le moment.” Tu plaisantes comme si c’était la dernière chose qui te restait, et sans doute que c’était un peu le cas. T’as aucune idée si tu dois remercier Anthéa ou la détester, mais le fait est qu’elle avait le droit de savoir ce qui était arrivé à son frère et qu’elle était la seule capable de s’occuper du bar. Ou du moins la seule avec l’autorité nécessaire pour éviter de le faire fermer. C’est du moins ce que tu veux te dire, le rationnel. Le fait est que Niamh est sans doute l’une des deux seules personnes qui pourraient t’éviter de te pendre dans ta cellule, et ta femme semble le savoir presque mieux que toi. Mais tu te doutes bien que tu ne pourras pas éviter le sujet plus longtemps. Ce serait injuste pour elle comme pour toi. “ ça a commencé avec Hayley.” Tu te dis que Niamh ne doit sans doute rien comprendre. ” Ce n’est pas vraiment à moi de te le dire, mais si je ne le fais pas, sans doute que personne le fera. Elle n’a pas été tuée par des … tu sais.” Un regard vers le gardien qui semble t’observer. Alors t’évites de faire allusion directement aux métamorphes, mais Niamh comprendra. “ C’est Lui, ça a toujours été Lui.” Le père, l’entité, qui les avait levé comme une armée contre une espèce qui n’avait rien fait pour leur valoir cette haine. Et t’avais plongé comme le soldat que t’étais. “ Nathan l’a appris et il a voulu .... Je sais pas, ça s’est passé beaucoup trop vite, j’ai voulu l’en empêcher et la seconde d’après il était inconscient.” Mort. Il était mort, baignant dans son sang, par ta faute. Y a pas vraiment de façons de le dire qui pourraient être plus acceptables. La vérité était immonde et pourtant c’était la tienne. “ J’ai paniqué, j’ai laissé Gidéon prendre les choses en main. Mais je pouvais plus faire comme si c’était jamais arrivé.” Tu marques une pause. “ Je suis désolé.” Désolé d’être un monstre, d’avoir menti comme si ce n’était rien, d’avoir enlevé la vie à ce frère qui avait pourtant tenté toute sa vie de valoir au moins autant sans se rendre compte qu’il était bien plus que tu ne serais jamais. Désolé d’être en vie alors que lui ne l’était plus. Juste désolé.

Tes mains tremblent, tu les sens contre toi. Tu as beau essayer de serrer les poings pour remédier au problème, rien ne change et la sensation de plus en plus désagréable ne fait que s'accroître. Pour lutter, tu ne trouves rien de mieux à faire que de fourrer tes mains dans tes poches, comme si c’était la meilleure des solutions. Là, pour la première fois depuis longtemps, tu te sens simplement faible, tu as l’impression de n’être qu’un vague pion sur un vaste échiquier. Mais tout ne tourne pas autour de toi Niamh. Rien en réalité. Le monde a su se débrouiller sans toi depuis ta fuite de ton mariage, depuis que tu as fuis le pays pensant que tu avais besoin de ce renouveau. Tu avais sans doutes besoin de ça pour redescendre sur Terre, il fallait que tu découvres que sans toi, ils savent tous très bien exister. Tu n’es pas essentielle, bien au contraire même et si pour d’autres cette découverte serait des plus néfaste, pour toi, elle te donne un nouveau souffle de vie. On pourra dire ce qu’on veut de toi, que tu es étrange sans doute mais tu sais aussi ce que tu fais, ce que tu dis et là, face à ton frère pour la première fois depuis des mois, tu arrives à sourire. La situation et le lieu ne s’y prête pas mais c’est comme ça, tu es comme ça en réalité. C’est juste bon de rentrer chez soi, de retrouver des visages familiers que jamais tu n’as su oublier, bien trop ancré dans ton esprit. C’est vrai que la prison n’était pas le lieu où tu imaginais retrouver ton frère. En réalité, tu ne sais même pas ce qu’aurait été le lieu idéal pour le retrouver, n’ayant jamais réfléchi à cette alternative. Là, c’est juste banal, c’est juste presque normal et c’est aussi effrayant. Tenir une conversation alors que vous êtes surveillés, parler comme si les choses n’avaient pas changer, c’est comme ça que tu sais fonctionner le mieux pour ne pas craquer, pour ne pas l’inonder de questions sous peine qu’il refuse de te répondre. Du temps, voilà ce que tu lui donnes avant de ne lui laisser plus aucun recourt. Parler de ce qui vous appartient, ce bar, c’est la première des solutions de substitution à la réelle conversation qui ne tardera sans doutes pas à venir. Tu essayes toi aussi à la retarder car la vérité, elle fait bien souvent plus de mal que de bien. “ Il fait du bon boulot en général.” Tu ne peux qu’approuver en hochant la tête. C’est vrai qu’en arrivant, tu ne pensais pas trouver les choses ainsi mais tu as été loin d’être déçue, même plutôt contente de ne pas avoir à te soucier plus que ça des affaires pour juste te concentrer sur le motif principal de ton retour, ton frère. Lui non plus n’y croyait pas à ta venue, tu étais bien loin d’imaginer que c’était ainsi que tu ferais ton grand retour dans cette famille qui n’est plus vraiment la tienne. Ce mariage, c’est ce qui t’a poussé à dire non, à arrêter les frais après tant d’année de soumission. C’est vrai que tu étais bien à faire le tour de monde, à ne pas avoir à te poser plus de question sur ce qui se passait dans ta ville natale et si tu as toujours les billets pour Osaka, tu sais aussi qu’il est trop tard pour faire machine arrière et repartir, ça serait lâche, ça ne serait pas toi. “ Désolé de t’avoir coupée dans ton tour du monde. Je t’aurais bien rejoint mais je suis un peu bloqué ici pour le moment.” Tu ne sais pas comment il fait pour relativiser de la sorte, pour réussir à plaisanter alors que ce n’est pas quelque chose d'anodin qu’il est en train de vivre. Castiel et toi, vous avez toujours été comme les deux doigts de la main, tu avais besoin de lui, tout le temps. Ta moitié en quelque sorte et tu ne regretteras jamais rien de votre passé ensemble. Quant au futur, il vous reste encore à l’écrire et tu comprends pas sa présence en ces lieux, que ça ne sera pas la chose la plus simple à faire. Oui il avait besoin de toi et tu es venue mais désormais, ce sont des réponses que tu as besoin, des réponses qu’il te faut. “ ça a commencé avec Hayley.” Hayley, votre soeur ainée. Tu détestes entendre parler d’elle et de ce qui lui est arrivé car à chaque fois, ça te rappelle qui tu dois détester pour ce crime. Tu n’as jamais compris les motivations, tu n’as jamais voulu ouvrir les yeux peut-être sur la réalité et là, tu ne caches pas ta surprise à Castiel de l’entendre mentionner votre défunte soeur. ” Ce n’est pas vraiment à moi de te le dire, mais si je ne le fais pas, sans doute que personne le fera. Elle n’a pas été tuée par des … tu sais.” Tu as beau comprendre de quoi il te parle ce n’est pas pour ça que ça a réellement du sens. Ta soeur, les métamorphes, tout ça c'est ton histoire désormais. Alors non, tu ne vois pas où ton frère peut bien vouloir en venir. « Explique-toi Castiel. » Ta voix n'est qu'un murmure, tu sais que le gardien présent avec vous dans cette salle vous observe, il peut entendre chacune de vos paroles et en aucun cas tu veux que ce qui soit dit entre ton frère et toi puisse lui porter préjudice. “ C’est Lui, ça a toujours été Lui.” La voilà la vérité, celle qui fait encore plus mal que tout le reste. Lui, ça ne peut être que votre père, celui qui vous a élevé qui a pris soin de vous à sa manière lorsque votre mère a disparu. Lui, ça ne peut-être que cet homme qui vous a appris à détester ceux qu'il jugeait inférieurs, ceux qui étaient indignes de vous d’après ses dires. « Tu… tu m’en, ce n’est pas possible. » Toujours cette même voix basse mais dans laquelle, cette fois-ci, on peut y lire tes larmes sans avoir besoin de regarder dans tes yeux. Elles ne coulent pas, elles sont à la frontière, elles trépignent d’impatience sur le seuil de la liberté. “ Nathan l’a appris et il a voulu .... Je sais pas, ça s’est passé beaucoup trop vite, j’ai voulu l’en empêcher et la seconde d’après il était inconscient.” Tu as fait une erreur en réalité. En ton absence, rien ne va visiblement. Ca datait déjà de bien avant, c’était quand vous étiez gosses mais désormais, même tes frères et soeurs se trouvent mêlés aux agissements funestes de votre père. Ca te désole, tu ne sais pas quoi dire, tu ne sais pas quoi faire car en réalité, tu as encore du mal à y croire, tu ne veux pas y croire. Ton propre frère a tué Nathan, le plus jeune de vous. Là, face à ton frère, tu ressembles à une statue, incapable de bouger parce que tu ne sais pas réellement à quoi ça servirait réellement. Il est là et pourtant, tu ne le vois pas, ton regard est rivé sur lui mais il le transperce. Ailleurs, tu es ailleurs et tu réfléchis à ce que tout ceci veut dire, où ça va bien pouvoir vous mener. “ J’ai paniqué, j’ai laissé Gidéon prendre les choses en main. Mais je pouvais plus faire comme si c’était jamais arrivé.” Et toi désormais, tu ne pourras plus jamais faire comme si tu ne savais rien. Ton père est le responsable de tous tes maux, depuis toujours, depuis ta plus tendre enfance probablement et c’est seulement aujourd’hui que tu le découvres. “ Je suis désolé.” Tu te fiches bien qu’il soit désolé, ça n’a plus aucune importance, plus rien n’en a en réalité. C’est comme si tu découvrais le monde pour la première fois, comme si on te faisait prendre conscience que non, tout le monde n’est pas gentil, que tout n’est pas inoffensif. « Pourquoi j’apprend tout ça maintenant… seulement maintenant. » Il s’en est passé du temps, un peu trop, pas assez, tu ne sais pas exactement quoi penser parce que ça te fait peur. Tu réalises ce qu’ils sont, des meurtriers. Ton frère, ton père. Il n’y a plus qu’Hécate, Phoebe et toi désormais et encore, tu n’es même pas sûre de ça. Tu penses et réfléchis, jusqu’à ce qu’un détails te saute au yeux, te revienne à l’esprit. « Mon accident… c’était lui aussi pas vrai ? » Cette fois-ci, ton regard rivé sur Castiel, il n’est pas comme invisible, il est bien présent et tu es incapable de détourner ton regard. Il te faut des réponses, tu as besoin de savoir Niamh ce que cette famille a encore à t’apporter, si jamais il y a réellement quelque chose ce dont tu doutes de plus en plus. « Répond moi Castiel ! C’était lui ou pas ? »