Un rire, amer qui retentit de mes lèvres. On fait de la merde et on la fait bien. Ça nous résumais parfaitement. Parfois, alors que l’alcool me faisais vaguer sur d’autre horizon, je pouvais presque entendre mes paroles, inlassablement, lui crier que je me foutais de lui. Qu’au fond, il n’était rien pour moi. Et chaque fois, je me sentais couler un peu plus, je sentais mon âme s’alourdir sous la honte, le regret, le manque. Mes yeux fixant l’horizon l’espace d’un moment, j’avais l’impression que rien n’avais de sens lorsque j’étais aussi loin de lui, aussi loin de son être, lorsque nos rires n’éclataient pas à l’unisson, un sourire, si semblable.
“Tu me manque.”
Les mots sortent sans que je n’ai le temps de les retenir, avant que j’ai le temps de me protéger, de lui, de ses mots, ses même mots qui avait tranché vérité sur vérité, mais qui m’avais aussi lacéré l’âme. Au fond, je me disais que cette matinée, avec Juliet, elle ne m’avais qu’enfoncé encore plus loin, plus profondément. Et même si d’un sens je me disais qu’il les avait pronconcé sur le coup de la colère, son rejet, il m’avait projeté plus loin encore dans ma noirceur, dans ma haine, ma douleur. J’avais eu l’impression de recevoir un coup de couteau, ou du moins, plusieurs, s’enfonçant encore et encore jusqu’à ce que je ne sois plus que lambeaux. Au fond, je me disais bien que mes mots, ils avaient dû lui faire le même effet, mais même présentement, en ce moment même, je ne savais pas, j’étais incapable d’être certaine qu’il ne les croyaient pas, qu’il ne se foutait pas de moi. Parce que même s’il venais de le dire, même s’il venait d’avouer qu’il avait peur de nous perdre, je n’étais pas rationnelle, je ne l’avais pas été depuis sa mort, depuis l’accident.
“Ce que tu as dit, l’autre jour, tu le pensais vraiment?”
Pas les quatre vérités, je les avaient méritées, elle était vraie, mais le rejet, au fond, j’avais besoin d’une confirmation, d’un signe, peu importe. J’avais besoin de lui comme j’avais besoin de la mer, des vagues, du soleil, mais je ne voulais pas me laisser de nouveau aller si c’était pour m’arracher le coeur avec son rejet.
Je fermais les yeux un instant, laissant les vagues, l’océan, la vie, m’envahir, combler chaque partie de mon être jusqu’à ce que plus rien d’autre. Je le savais, même si aujourd’hui. pleine d’espoir et de bon sentiment, je lui dirais que j’arrêtais tout, que les hommes, les bagarres, la drogues, l’alcool, je mettais tout de côté, j’arrêtais aujourd’hui, mais je le savais, je me connaissais, je n’étais pas prête, pas prête à géré ma douleur, à oublier. Au fond, je me demandais presque si je voulais m’en sortir, si je voulais remonter à la surface. J’ouvris les yeux, croisant ceux de mon frère, mon jumeau de coeur, j’aimerais lui dire qu’il pouvais compter sur moi, mais ce serait mentir, ce serait lui donner des espoirs alors même que quelques heures plus tard je me retrouverais devant lui, détruisant les fausses vérités que je venais d’énoncer. J’étais heureuse que lui soit capable, que lui ai assez de force pour passez au travers, pour remonter la pente, finalement, j’étais réellement la plus faible d’entre nous, celle qui entraînais les autres encore plus loin dans les ténèbres, celle qui n’avais pas assez de colonne pour affronter la mort de son meilleur ami, d’un partie de son âme. “Je peux pas. Pas tout de suite. Pas maintenant. Ce serait te mentir que de dire que j’en suis capable.”
Je pouvais lâcher les hommes, les bagarres, mais je le savais, tôt ou tard je retomberais dans la drogue, dans l’alcool. Et au fond, je ne savais même plus ce qu’il me fallait pour me sauver, je ne savais même plus ce qu’il me fallait pour me sauver de moi-même. Bientôt, je le savais, je retournerais dans le cercle vicieux qu’était ma vie, alors même que lui essayais de s’en sortir. Et je la comprenais, sa demande, elle faisais bien du sens, je le savais que dans la situation inverse, j’aurais eu besoin de lui, en pleine forme, pas d’une loque humaine comme j’étais devenue.
“Je suis désolée.”
Et c’était con, je le sais, de lui refuser cette unique demande, mais pour la première fois depuis des jours, des semaines, je voulais être vraie, avec lui, avec moi. Et cette vérité, elle était dure, elle n’était pas jolie, elle faisait franchement preuve de lâcheté, mais le courage n’avais jamais été un trait de caractère chez moi, la stupidité, l’intrépidité, la folie, mais pas le courage. J’étais lâche, égoïste, faible. Je n’étais pas solide, je n’étais pas un phare dans la tempête, ce n’était pas de moi qu’il avais de besoin finalement. Je ne ferais que l’entraîner vers le fond. Alors je me retourne, nageant vers la rive, m'enfuyant de nouveau, lui tournant le dos. Il n'avait pas besoin de moi, je ne ferais que le tuer à petit feu, j'étais telle une chaine à ses pieds, un boulet. Une larme coulant sur ma joue, alors que je tournais le dos à la seule personne que je considérais comme un jumeau, un frère véritable.
Accueil
