Oscar Alaric Litchfield | "I'll drown them all"

Mes parents m'ont appelé Oscar Alaric Litchfield ! Je suis né le 14 mai 1974 à Bray, en Irlande. Je suis un élément de 42 ans. Pour plus de précisions, je suis hétérosexuel et présentement marié. Je suis fier de dire que je travaille en tant que directeur d'un club de boxe et homme de main de l'O.B.C.M., ça m'aide à payer mes factures. Je suis d'ailleurs plutôt modéré On me dit souvent que je ressemble à Mark Pellegrino, mais en mieux, quand même. Une dernière chose, je fais partie du groupe de l'Eau, et plus précisément je suis un triton.

« -Je suis là pour le poste d'hommes de main.
-Oh, mais je vous reconnais ! Vous êtes le père de…
-Oui.
-Je suis désolé pour votre perte…
-Je ne suis pas là pour vos excuses, je suis là pour le poste. Vous allez me le donner oui ou non ?
-Assez-vous et racontez-moi votre histoire. Je veux savoir quel genre de personne j'embauche.
-J'espère que vous avez le temps. Tout commença par... »


« -Regarde dans quel état tu es… Oh, mais tu saignes !
-C'est rien, dit-je mal assuré, parce qu'en réalité, cette coupure me faisait un mal de chien
-Qu'est-ce qu'on t'a dit, tu ne dois sortir de l'eau sous aucun prétexte ! Non seulement tu nous désobéis mais EN PLUS, tu as failli te faire tuer ! Tu crois que tout ceci est un jeu ?! »

Je roulai des yeux, ma mère en faisant toujours des tonnes. Et puis, je m'en étais sorti en un seul morceau, non ? Bon, j'avoue que c'était vraiment pas passé loin. Heureusement, j'étais plus rapide que lui. Cependant, il m'avait fait une belle entaille dans le dos pendant ma fuite.

Ce jour-là, la dispute avec ma famille fut violente, je n'avais jamais vu ça. J'ai vraiment cru qu'ils allaient achever ce que le chasseur avait commencé. Au lien de ça, ils n'ont pas cessé de me hurler dessus, comme quoi j'avais mis la famille en danger, comme quoi j'aurais pu y rester, comme quoi le monde extérieur est dangereux. Ils n'avaient pas tort. Mais ils n'avaient pas entièrement raison non plus. Enfin ça, c'est ce que je pensais quand j'étais encore qu'un ado, la tête remplie de rêves et d'espoirs. Si je pouvais remonter dans le temps, je me foutrais deux ou trois gifles pour me remettre tout cela en place.



Je ne fis pas de grandes études. À vrai dire, j'ai à peine le baccalauréat (en S tout de même, je vous prie). Je n'ai jamais apprécié l'école. Je trouvais ça d'un ennui ! Alors, après le lycée, j’enchaînai les petits boulots, un jour serveur dans une brasserie, un autre, j'étais vendeur dans une petite épicerie. Ce n'était pas tous les jours faciles mais je m'accrochais, je faisais aller. Je gagnais de quoi me payer un petit appartement en ville, rien de bien extravagant.


Et puis, un jour, je devins directeur d'un club de boxe. Un rêve venait de se réaliser. J'en faisais depuis plusieurs années déjà. Bon, c'est vrai qu'avec mes petits boulots, participer aux entraînements était devenu compliqué, mais désormais, j'allais pouvoir me consacrer pleinement à ma passion.  Vous savez, la boxe est vraiment un beau sport. Elle permet de casser des nez et des mâchoires en toute légalité. C'est dingue ce que ça défoule. C'était ça où le premier péquenaud qui posait un peu trop de questions y passait.


A quelques rues du club se trouvait un bar, le « Superwholock ». Je n'avais jamais entendu un nom aussi bizarre. Je passais tous les jours devant sans jamais oser m'arrêter. Mais un jour, je poussai la porte d'entrée et j'allai m'asseoir à une table, dans le fond. J'avais les yeux rivés sur le menu, si bien que je ne la vis pas tout de suite. Je levai les yeux. Elle était là, sublime, étincelante. Ses longs cheveux bruns descendaient en cascade sur ses frêles épaules. Ses yeux brillaient d'une lueur malicieuse et sa voix était si claire. Je restai bouche bée pendant plusieurs secondes, ce qui vu de l'extérieur, devait être très embarrassant (et très drôle). Je commandai un café. Noir, sans sucre. C'est ce que je fis pendant les mois qui suivirent. Tous les jours, je venais m'asseoir à cette table et je commandai la même chose. Tous les jours, elle me l'apportait, son sourire illuminait ma journée. Un jour, j'osai enfin. Je lui proposai un rendez-vous. Le temps de sa réponse me parut durer une éternité. Elle accepta. Je souris comme un débile. Les mois passèrent et nous emménageâmes ensemble dans une maison. Mon travail en tant que directeur et elle en tant que serveuse nous permettait de nous l'offrir. Puis, on se maria. Tout allait pour le mieux



« -Regarde Tracy, c'est ton papa »

J'entrai en trombe dans la chambre d'hôpital de Karen, les médecins n'avaient pas voulu me laisser passer plus tôt. En même temps, c'était vraiment pas le moment de m'énerver alors ce nez cassé, ce mec l'avait bien cherché. Je m'essuyai la main sur mon jean, l'air de rien, et lui tendis un bouquet de fleurs de l'autre. Je posai les fleurs sur la table sans vraiment prêter attention à ce que je faisais. Non, toute mon attention était focalisée sur ce petit être que ma femme tenait dans ses bras. De toute ma vie, je n'avais jamais rien vu d'aussi magnifique. Ses grands yeux bleus me toisaient avec tellement de douceur. Ses petites mains étaient si douces et si minuscules, Tracy était absolument adorable.



Les années passèrent, la vie s'écoulait comme un long fleuve tranquille. Karen était devenu secrétaire à l'hôpital du coin, je gardai mon poste de directeur du club de boxe. Je vis Tracy grandirent, dire ses premiers mots, faire ses premières bêtises. Je la regardais s'épanouir : son premier jour d'école, ses premiers anniversaires en compagnie de ses amis. Je la vis mûrir, découvrir sa nature de sirène. Tout comme mes parents, je la mis en garde contre les chasseurs et tout comme moi à son âge, elle ne m'écouta pas.



C'était le dernier jour du Bray Summer Fest, Tracy était partie le matin dans l'optique d'y passer la journée avec des amis. Le soleil brillait, la brise était légère : une journée parfaite en perspective. Je restai à la maison, de la paperasse à remplir, des trucs à envoyer, d'autres à signer, bref, ça s'annonçait bien fun, cette histoire. L'après-midi avançait lentement et j’enchaînais les papiers tous plus inutiles les uns que les autres. Sérieux, est-ce que ça intéresse quelqu'un de savoir que machin donne une conférence sur « l'élevage des carottes en Amazonie » et que vu, qu'apparemment, les carottes ont des trucs à voir avec la boxe, on est tous invité à y participer ? Non, c'est bien ce que je pensais.
Mon téléphone sonna, je soupirai de soulagement, heureux de pouvoir enfin penser à autre chose qu'à ces fichus papiers. « Numéro inconnu ». Je fronçai les sourcils, c'était impossible, les seules personnes à avoir ce numéro sont ma femme et Tracy. J'hésitai à répondre, mais la curiosité fut la plus forte et je répondis.

« -Allo ?
-Allumer la télé, M. Lichtfield.
-Pourquoi ? répondis-je tout en empoignant la télécommande et en changeant de chaînes à toute vitesse pour tomber sur celle des infos, qui êtes-vous ? »

Il raccrocha. Je détournai les yeux pour poser le portable et à la minute où je les relevai vers la télévision, mon cœur s'arrêta. Je ne me souviens plus vraiment de ce qu'il se passa à ce moment-là dans mon esprit. Le vide, sans doute. La douleur, sûrement. Je sortis en trombe et je me dirigeai à toute vitesse vers le lieu de la fête, laissant la télévision allumée, des images de ma fille crucifiée, ensanglantée. Lorsque j'arrivai près de la place, j'eus à peine le temps d'analyser la situation. Au loin, on pouvait la voir, accrochée, là, tel un trophée de guerre. Mon cœur se souleva, je ne pouvais supporter une telle vision d'horreur. Ma fille… Mon trésor… Exposée en pleine place publique. Je m'approchai en courant, je voulais la détacher, je voulais la sauver, je voulais la prendre dans mes bras, me dire que tout ça était le fruit de mon imagination, que je me faisais du soucis, comme d'habitude. Je voulais penser que tout ceci était un rêve, que je m'étais endormi sur les papiers et que j'allais me réveiller. Mais non. Plus je me rapprochais, plus la scène se précisait. Ces monstres l'avaient accrochée sur une croix, l'avaient dépecée, éventrée. Comment pouvait-on faire ça ? A une adolescente ? Son sang se répandait sur le sol, comme s'il avait comprit que c'était fini. La vie l'avait quittée. Mais pourquoi ? POURQUOI ELLE ?! Des larmes coulaient sur mes joues, ma respiration faisait des montagnes russes. Le temps semblait s'être arrêté, me laissant contempler le massacre. C'était de la torture. Autour d'elle, des centaines de vautours, venus pour admirer le spectacle s'étaient attroupés. La télévision, les voisins trop curieux et les pires, les photographes venus immortaliser ce précieux moments. J'aurais voulu tous les repousser. Cesser de la regarder comme si c'était un monstre de foire, C'EST MA FILLE ! Je poussai les gens, j'allais la sauver, j'allais la ramener à la maison. On pouvait arranger, j'allais arranger ça. Ce n'était rien, ce sang, c'était peut-être pas le sien ? C'était peut-être du faux ? Une blague de mauvais goût ? J'arrivai à hauteur de la barrière de fortune mise en place par les policiers. Au moment où j'allais les pousser pour pouvoir passer, une explosion se fit entendre et je fus propulsé en arrière. J'eus le souffle coupé. Ce choc me fit reprendre conscience. Ce n'était pas un rêve. Tout ceci était réel. Je me relevai. Les feux d'artifices avaient calcinés son corps. Il n'en restait qu'un morceau de chair brûlée. Des cendres. Un souvenir.



« Je suis vraiment désolé pour votre fille »

Le coup partit tout seul, un craquement sinistre se fit entendre quand mon poing rencontra sa mâchoire. Il cracha du sang, ce qui rouvrit encore un peu plus la plaie béante que je traînais depuis la mort de… Depuis sa mort. Je rentrai chez moi, je ne voulais plus voir personne. Tous les gens que je croisais me regardait avec ce même air, de la pitié, du mépris. Je rentrai la tête dans les épaules. Je me coupai du monde, j'y arrivais plus, c'était insupportable. Des gens étaient insupportables. Croyant satisfaire leur conscience avec leurs « désolé » et « oh mon dieu, je suis de tout cœur avec vous ». J'avais envie de leur en mettre une à chaque fois que quelqu'un me disait ça. Parce qu'au fond, je savais que c'était faux. Et vous savez ce qui a été le pire ? Devoir identifier le corps à la morgue. Et là, il n'y avait personne pour nous soutenir, ma femme et moi. Nous étions seuls, devant le cadavre mutilé et calciné de Tracy. Obligé de devoir faire face à toute l'horreur dont les hommes sont capables. Ce n'est pas ainsi que ça devait se passer. Les enfants ne sont pas supposés mourir avant leurs parents. Ce n'est pas dans l'ordre naturel des choses.



Les semaines passèrent, mais la douleur était toujours présente. Pesante, étouffante, oppressante. Je passais des heures, assis au bord du lit, une bouteille de Whisky à côté de moi. Pour oublier. Ma vie ne connaissait plus que deux vitesses : dans la première, j'étais totalement soûl. Dans la deuxième, je sortais, il fallait que je me vide la tête. Mais parfois, ces deux vitesses se confondaient. Je m'en fichais. Les gens se contentaient simplement de me reconduire chez moi, toujours ce petit air condescendant graver sur le visage, c'était une mode ou quoi ? Même les policiers s'y étaient mis. J'étais devenu le pauvre Oscar Litchfield, le type qui avait perdu sa fille de manière atroce alors il fallait l'excuser, hein, parce que la douleur lui faisait perdre la tête. Bah écoutez-moi bien, j'étais parfaitement lucide. Et devinez quoi, gros malins, je trouverai trouver qui a fait le coup et je leur ferais payer pour ce qu'ils ont fait.


Cette nouvelle obsession, trouver les coupables, avait littéralement foutu mon couple en l'air. La douleur associée au fait que je n'avais plus qu'une seule idée en tête fit mourir à petit feu mon mariage. Nous étions des épaves, tous les deux. Tentant tant bien que mal de retrouver un sens à nos vies. Cet objectif me maintenait la tête hors de l'eau. Je refusais de m'arrêter, je ne reculerais pas. Mais ma femme n'avait plus rien. Nous refusions d'avoir un deuxième enfant. Pas peur ou tout simplement parce que rien ni personne ne pourra combler le vide que Tracy a laissé. C'était ma fille, mon trésor et ces enfoirés me l'ont prise. Je jure sur ma vie qu'ils payeront, tous autant qu'ils sont.


« -Vous êtes engagé. Bienvenue dans l'O.B.C.M., M.Lichtfield. 
-Je commence quand ?»