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 we both know we ain't kids no more + Meurswell

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Meursault & Maxwell

«You look like a movie, you sound like a song. My God, this reminds me of when we were young»
T'as jamais été du genre inactif. Tu fais du sport, tu danses, tu sors dès que tu peux, même lorsque tu resterais volontiers dans ton lit, ton corps te faisant souffrir presque continuellement. Mais à un certain degré, t'arrives à en être anesthésié, à ne plus rien sentir, comme si t'étais pas couvert de bleus. C'est peut-être ça ta définition du progrès. Quoiqu'il en soit, t'es toujours plus heureux quand t'es hors de la maison. Pas de beau-père pour analyser tous les gestes que tu fais et trouver celui qui va le mettre en rogne, pas de silence pesant lorsque t'es en présence de ta sœur ou de ta mère, ou du gamin que t'as du mal à approcher. Tu prends le boulot qu'on te donne presque avec soulagement pour éviter ce genre de situations. Et au boulot, t'y es tous les soirs. Parfois, y a pas beaucoup de travail, Bray est une petite ville et comme dans toute petite bourgade du genre, rares sont ceux qui décident de commander de la bouffe un lundi soir. Mais les samedis, comme ce soir, tu ne t'arrêtes plus. T'as de la chance d'être tombé sur un patron qui ne t'en demande pas trop. Sous son air rustre, il est plus agréable que tous les hommes qui t'entourent réunis. Faut dire que tu places pas la barre bien haut à ce niveau-là, avec Richard. Ce soir, c'est un de ces soirs où tu ne le vois pas beaucoup, cela dit. Tu te rends au foodtruck, il te donne des pizzas et des adresses. Si t'as un peu de chance tu repars avec un pourboire dans la poche pour retourner au camion et repartir presque immédiatement. T'es crevé, faut le dire, t'arrives à la fin, t'as bientôt terminé ton shift et il est pas loin de tout remballer, comme il te le dit, pour enfin pouvoir se mettre devant sa télévision avec une bière. Il en rêve depuis le début de la soirée, comme quoi tes ambitions sont loin d'être les plus basses. Mais c'est pas comme si t'avais quelque choe de mieux de prévu, toi, à part une douche et l'insomnie qui ne manquerait pas de pointer le bout de son nez. Mais t'avais une dernière course. Il te tend la pizza avec un air de soulagement. "Après ça tu peux rentrer chez toi si tu viens un peu plus tôt demain. Je suis vanné, j'ai juste envie de rentrer donc je t'attendrais pas. " Tu hausses légèrement les sourcils. La confiance accordée te va droit au cœur, et sans doute que ça serait jamais arrivé si t'avais fait le même boulot à Paris. Mais tu acquiesces, tu attrapes la dernière pizza à livrer puis lui souhaite une bonne soirée. Il sait que tu tiens à ce boulot, comme si c'était ta porte de sortie alors que, honnêtement, tu touches pas assez pour pouvoir faire des économies suffisantes pour pouvoir te barrer. Mais c'est pas de sa faute, il fait comme il peut. Pour le moment il s'en sort pas trop mal, faut dire, mais il sait que le jour où la concurrence s'installera, il aura du souci à se faire. C'était pas plus mal d'être le seul pizzaïolo du coin. Tu mets la commande dans le panier de ton vélo, et après un dernier signe de la main, tu repars. Golden Coast. T'aimes pas spécialement aller dans ce quartier, sans doute parce que ça te rappelle ce que t'as jamais eu, toi t'es né du mauvais côté, tu fais partie de Dragon Alley. Même quand t'étais à Paris, t'as jamais vraiment eu la vie dorée qu'on prête aux habitants de la capitale, tu faisais partie des autres, ceux qui galèrent, qui bossent à s'en détruire les paumes pour avoir un maigre salaire. T'as ce défaut d'arriver à jalouser n'importe qui ayant une meilleure vie que toi, et sans doute que ça en fait un paquet. Surtout que t'es le genre à penser que la fortune peut faire le bonheur si on ferme les yeux sur tout le reste. Mais tu connais cette adresse. Et faut dire que t'es pas mécontent de t'y rendre non plus. C'est pas rare que Maxwell Graham commande et apparemment, il aime particulièrement le foodtruck. Mais encore une fois, y a pas franchement de compétition alors c'est plutôt simple de se faire une clientèle. Tout ça pour dire que la première fois que tu t'y es rendu t'as été un peu décontenancé. Par l'allure de l'homme, qui est loin d'être semblable à ceux à qui tu livres en général. Bon, faut l'avouer, y a pas mal de nanas qui continuent d'appeler en espérant que t'allais finir par les remarquer. Le fantasme du livreur, c'est pas seulement une légende de ce que t'as pu en voir. Pas vraiment de chances pour elles étant donné que t'as jamais regardé une seule femme de toute ta vie. Mais là, c'est plutôt toi qui appréhende à chaque fois que tu vas chez Graham  - et si tu connais son nom c'est seulement parce qu'il faut bien en mettre un sur la commande. Tu poses ton vélo devant l'immeuble. A cette heure il ne gênera personne. T'aurais eu un peu plus de scrupules s'il s'était agit de ta rue, mais ici y a pas de gros risques. T'attrapes le carton dans le panier et tu sonnes. Un digicode et une sécurité renforcée, t'en rêverais presque. T'entends l'interphone s'allumer, inconsciemment tu remets tes cheveux en place, comme s'ils en avaient besoin. De toute manière t'as passé la soirée à bosser, t'as pas spécialement l'allure d'un mec qui sort d'un gala. Tu t'éclaircis la voix. " C'est le livreur ! Je suis en bas avec votre commande. " Le pourquoi du comment de ton stress t'échappe, mais t'essaies un minimum de le contenir.  
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Le solstice d’été avait marqué cette date de l’année où le jour est le plus long. La lumière inondait notre partie du monde même lorsque les nuages cachaient le soleil. Il accompagnait les boulangers dès les premières minutes de leur réveil, suivait les travailleurs aux horaires plus réguliers et était encore là quand les travailleurs prenaient leur garde de nuit. A Dublin, les médecins avaient quitté leur bureau à 16h30 comme à leur habitude. Pourtant, dans l’un d’eux un type était encore en train de fixer un écran avec trois cadavres de tasses de café à côté de l’ordinateur. Avec l’afflux de nouveaux patients dû à la fermeture des petits hôpitaux, le temps de travail s’était allongé. Les heures supplémentaires étaient habituelles pour lui. Les informations manquaient et plusieurs collègues pensaient que certains diagnostics accrochés à ces nouveaux patients étaient erronés. Le travail de manquait pas. Sans doute que sans un coup de fil de sa mère, Maxwell serait resté enfermé dans cette pièce jusqu’au petit matin. Les nuits blanches aussi étaient habituelles pour lui mais pas forcément idéales pour sa santé. Maria était la personne la plus importante dans sa vie et, sous ses airs hargneux, le médecin était un véritable fils à maman. Elle le convaincu de rentrer chez lui et il insista pour passer la voir demain soir. L’inquiétude ne le quittait pas face à la fatalité qui accompagnait un diagnostic aussi meurtrier. C’était d’ailleurs la première fois de sa vie qu’il était incapable de se donner corps et âme à son métier.

En quittant le service, son sac sur l’épaule, son estomac commença à grogner. Après tout, il était déjà 21h et son dernier repas datait de presque dix heures complètes. Il n’était pas vraiment fatigué mais, une certaine flemme de faire la cuisine si tard le soir le prit et, le trajet pour rentrer à Bray n’était pas encore derrière lui. Un coup de téléphone plus tard, une pizza végétarienne sans poivron était commandée dans sa pizzeria préférée. Sa mère était une excellente cuisinière et Maxwell avait beaucoup appris d’elle. D’habitude, il cuisinait par lui-même, y compris les pizzas. Mais ces temps-ci, ses horaires étaient tels que le temps lui manquait énormément et un food truck venait de débarquer en ville. Ses créations étaient plutôt bonnes et avaient le mérite de ne pas goûter le surgelé ou dégouliner de graisse comme celles qu’on pouvait trouver dans les grandes chaînes ou les supermarchés.

Un peu moins d’une heure plus tard, il arrivait en voiture dans sa rue. Un accident sur la route l’avait retardé par rapport à ses calculs et, comme il le craignait, le livreur était déjà là, debout devant sa porte. Bon, à moins qu’il ne soit venu particulièrement en avance, normalement, il n’avait pas attendu trop longtemps. Il gara sa voiture juste devant chez lui. Le quartier était bien fréquenté – à part ce connard de voisin -, il n’y avait pas trop de risque à ne pas disposer d’un garage. Une fois le petit clic de la voiture verrouillé, Maxwell rejoint le livreur. Comme à son habitude, il était vêtu d’une manière classe et sobre, une chemise blanche légèrement ouverte, une veste de costume grise et un pantalon noir. Les couleurs, ce n’était définitivement pas son truc. Il s’excusa directement et sorti son portefeuille pour payer la pizza :

« Désolé, il y a eu un accident sur la route et toute la circulation était paralysée »

Il lui tendit le double de la valeur de la commande. Le pourboire était plutôt large mais, c’était pour l’attente. Après tout, il aurait simplement pu repartir avec la pizza pour lui et laisser Maxwell comme un con. Le médecin remarqua d’ailleurs que c’était toujours le même livreur. D’un autre côté, il n’allait pas s’en plaindre, le type était véritablement beau. Son physique pouvait sans aucun doute lui ouvrir les portes du monde du mannequinat et des plateaux de tournage. D’ailleurs, il le soupçonnait d’être l’argument commercial numéro un du food truck.

« J’espère que vous n’avez pas attendu trop longtemps », ajouta-t-il comme pour s’excuser une deuxième fois.

Sans doute devait-il être la dernière livraison de la soirée vu l’heure. Si le livreur avait été une livreuse, sans doute Maxwell aurait-il entamé la conversation ou demandé directement son numéro. Malheureusement, il avait appris à ses dépens, qu’avec les hommes ça ne fonctionnait pas tout à fait de cette manière et qu’une tentative de drague avait 90% de chance de finir en une réaction négative. Les probabilités étant contre lui, il n’essayait même plus. Par contre, il n'était pas vraiment un bon comédien, ses émotions transparaissaient sur son visage. Du coup, il ne pouvait s'empêcher d'afficher un sourire charmeur sans vraiment s'en rendre compte.

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«You look like a movie, you sound like a song. My God, this reminds me of when we were young»
Tu ne sais pas vraiment combien t'as fait d'allers-retours ce soir, à naviguer entre les rues de la ville, t'as l'impression de la connaître mieux que personne maintenant alors que t'es là depuis à peine quelques semaines. Mais ce soir, on peut dire que c'était une grosse soirée pour le food truck, c'est sans doute pour ça que le vieux Jim était tellement content qu'il t'a exempté de revenir jusqu'au lendemain. Toi ça t'arrange, t'as qu'une envie c'est de prendre une douche et d'aller te coucher. Non pas que ce soit aussi facile chez toi, qu'on se le dise, tu sais que tu devras éviter Richard, peu importe l'heure à laquelle tu rentres et surtout peu importe ton état. Tout de suite, t'as pas la force de l'affronter, mais pour être honnête, tu te demandes quand est-ce que tu l'auras. Mais de toute façon, faut que tu finisses cette dernière course, et pour le moment, tu te retrouves en tête à tête avec un interphone qui sonne dans le vide. Ça fait déjà quelques minutes que t'es là à attendre comme un con, le carton de pizza dans une main. Tu soupires, sors ton téléphone pour appeler le numéro utilisé pour passer la commande. Répondeur. Tu hésites, peut-être un peu trop, sur ce que tu devrais faire. Une partie de toi se demande si ce ne serait pas mieux de partir, rendre la pizza à Jim quitte à te faire engueuler pour ton manque de patience. Mais il t'en voudrait qu'à moitié, tu le sais, il a fait une bonne soirée alors c'est pas une merde sur le dernier ride qui le ferait criser au point de te virer. Mais d'un autre côté, t'as pas envie de faire les choses à moitié et ça t'agacerait au point de pas pouvoir en dormir si tu devais te casser maintenant. On a beau te dire que tu fais que livrer des pizzas, que c'est pas le job le plus gratifiant du monde, tu pourrais ramasser les ordures dans la rue que tu ferais en sorte de le faire parfaitement, parce que c'est dans ton caractère, quoi qu'en dise ton beau-père. T'essaies de pas te demander non plus si t'es déçu de pas pouvoir bien faire ton boulot ou si c'est parce que tu te souviens parfaitement du client aujourd'hui aux abonnés absents, et que t'aurais bien aimé le croiser à nouveau. Attitude quelque peu juvénile, il faut bien l'admettre, mais t'as eu trop peu d'occasions dans ta vie pour ne pas te sentir un peu démuni quand quelqu'un te plaît ne serait-ce que visuellement. Alors t'es toujours là quand tu entends une voix dans ton dos. Tu sursautes un peu, t'as même pas entendu la voiture se garer tellement t'étais perdu dans tes pensées. Tu te retournes vers l'homme qui s'avance désormais vers toi. Tu pourrais faire la gueule, lui dire que t'as d'autres choses à faire que distribuer des pizzas - sûrement un peu plus froide que prévu, pour le coup – et que t'aimerais bien vaquer à d'autres occupations que poireauter dix minutes devant un immeuble huppé de Bray. Mais ton agacement s'efface aussi vite qu'il était arrivé. Tu secoues la tête. " Pas de soucis, j'espère que ce n'était pas trop grave. " Les phrases que tu sors, des phrases automatiques, qui n'ont peut-être de sens que pour toi, alors tu tiens à préciser ta pensée. " L'accident sur la route. " Pour dire toute la vérité, t'en as pas grand-chose à faire du mec qui s'est planté en bagnole, mais fallait bien que tu réagisses au lieu de rester les bras ballants sans rien dire. Tu finis par lui tendre sa pizza, d'ailleurs, que t'avais presque oublié. Tu lui souris, comme pour lui faire comprendre que ça te dérange pas vraiment. Tu te sens con quand tu te dis que t'aurais pu attendre encore longtemps étant donné que t'étais pas spécialement parti pour laisser sa commande sur le trottoir. Tu récupères l'argent qu'il te donne avec un haussement de sourcils. Tu réalises, quelque part, que t'es en face de quelqu'un avec qui t'as rien en commun. Toi tu réunis tes centimes pour pouvoir t'acheter une pizza, lui il te file le double du fric juste parce qu'il peut. Autant dire que tu viens de baisser en valeur dans ta propre échelle de mesure. Mais tu lui souris. " Merci, n'hésitez pas à me faire attendre à chaque fois hein." T'as un humour pas franchement drôle mais ça te permet de te détendre un peu alors que t'es toujours un peu mal à l'aise quand t'es le centre d'attention ne serait-ce que d'une seule personne. " Vous êtes mon dernier client, alors l'attente n'est pas spécialement ennuyeuse. Ça aurait certainement été problématique en début de soirée mais le foodtruck est fermé alors je n'ai plus personne pour me le reprocher jusqu'à demain." Enfin … Pas Jim en tout cas. 
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Le retard n’était pas vraiment dans ses habitudes, bien au contraire. Plutôt bien auto-discipliné, il honorait toujours ses rendez-vous. Généralement, il était celui qui attendait avec une moue fâchée. Mais la vie était pleine de contradictions et de frustrations, les choses ne se passaient pas toujours selon nos plans et nos prévisions. Sans cet accident à une centaine de mètres de lui, il n’aurait sans doute jamais pris le temps de discuter avec le beau livreur. D’habitude, leurs échanges se limitaient au payement de la pizza. Maxwell n’était pas vraiment quelqu’un de particulièrement sociable d’habitude. Cette soirée n’était pas vraiment différente mais, il était en tort et devait au moins essayer de faire bonne figure. En parlant de figure, la fatigue marquait ses traits et dans un coin de son esprit, les problèmes de ses patients continuaient à être tournés et retournés dans tous les sens. Ce n’était pourtant pas l’estomac vide et l’esprit engourdi que la trouvaille du siècle allait se présenter à lui.

Visiblement, le pourboire permettait de l’excuser puisque le serveur plaisanta sur de futurs retards. Qu’il ne compte pas trop là-dessus, les probabilités n’étaient pas véritablement en sa faveur. Il expliqua que ce n’était pas tant un problème puisqu’il était le dernier client. Vu l’heure, ce n’était pas très étonnant. Au moins, ce problème qui n’en n’était pas vraiment un lui permettait de discuter avec. D’ailleurs, il remarqua son accent français à couper au couteau. Le peuple français n’était pas vraiment connu pour son délicieux accent lorsqu’il parlait anglais mais, beaucoup trouvait ça sexy. Allez savoir. Sans doute que les français partageaient avec les italiens la réputation d’être des chauds lapins. N’empêche, il se demanda un instant pourquoi ce type était venu se perdre en Irlande avant de se reprendre et de se dire que ce n’était tout simplement pas ses affaires.

« Je ne savais pas que les français faisaient aussi des pizzas », dit-il en souriant.

Dans ses mains, la pizza était presque froide. L’habituel parfum de fromage et de légumes qui s’en dégageait était absent. Pourtant, son estomac grognait déjà. Son regard passa du carton au livreur qu’il ne voulait pas vraiment voir s’en aller. La dernière fois qu’il avait fait des avances à un homme, il s’était fait insulté. Cette dernière fois remontait à presque deux ans et depuis, il se contentait des applications de rencontre qui avaient le mérite de lui éviter de perdre son temps. Malheureusement, cette fois il n’était pas face à un profil affiché sur un écran mais bien à un être humain en chair et en os. Enfin, être humain c’était encore à discuter mais il n’en savait rien … Ça aurait été tellement plus simple sur téléphone. Les mecs qu’il rencontrait lui épargnait toute la partie sociabilisation et ça lui convenait très bien. Tout ce qui était décryptage d’émotions et signaux corporels ce n’était pas pour lui. Après tout, 90% du temps il ne savait pas lui-même ce qu’il ressentait. En cet instant, il savait juste qu’il était fatigué et qu’on ne croisait pas des livreurs aussi beaux dans chaque restaurant. La fatigue l’aida à prendre sa décision,il le regarda dans les yeux et proposa avec un sourire :

« Je la fais réchauffer et on partage ? »

Sans doute allait-il passer pour un psychopathe (pour changer) ou pour un mec vraiment désespéré – ce qu’il n’était pas – mais au moins il sera fixé. Son manque de sociabilité lui évitait d’angoisser sur des questions qui concernaient ce que les autres pouvaient penser ou l’horreur d’un râteau. Depuis petit, il savait qu’il était différent des autres et, des râteaux il s’en était pris plus d’un. Heureusement son égo ne dépendait absolument de l’aspect relationnel de sa vie.


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Tu sais pas vraiment pourquoi tu restes là. T’as ton argent, que t’as mis dans la poche prévue à cet effet à l’intérieur de ta sacoche. En règle générale, c’est le moment où les clients te considèrent comme transparent, t’as fait ton job alors tu peux tout aussi bien retourner à ta propre existence pendant qu’eux se contenteront de manger ce que ton patron a préparé. Pourtant, t’es toujours là, et lui aussi, malgré la pizza refroidie dans les mains de son propriétaire légitime. Non pas que ça te dérange, loin de là. Il faut dire que les conversations, ou même les rencontres, ne sont pas légion dans le coin et en dehors du boulot, t’as du mal à fréquenter qui que ce soit. Parce que tu sors pas vraiment dans les bars, t’as rien contre l’alcool mais t’es pas franchement à l’aise avec l’ambiance qui règne généralement dans ce genre d’endroits. Alors tu restes là, parce que c’est plutôt clair que t’es pas encore prêt de rentrer chez toi, tu cultives plus ou moins ce début de conversation, même si t’es pas très doué pour ça non plus. T’oses un petit rire. “ Je suis plutôt certain qu’ils font de la pizza plus ou moins partout.“ Tu le sais, que ton accent vaut pas grand-chose. Pour ta défense, t’es là que depuis quelques semaines et malgré ton père, tu n’avais pas besoin réellement de parler la langue, alors t’as du mal à faire disparaître les intonations de la langue française. Faut dire que pour répondre à une carte d’anniversaire, t’avais pas besoin d’avoir un niveau très haut. “ ça se voit tant que ça hein? J’ai grandi à Paris. “ Il trouvera peut-être ça étonnant, un parisien à Bray, ce n’était pas la chose la plus commune du coin. Mais ce n’est pas comme si on t’avait donné le choix, on t’as parqué dans l’avion sans se soucier du fait que toi, t’aurais tout fait pour continuer à vivre dans la capitale. Parce que Bray c’était adorable, mais c’était loin d’être aussi enivrant que Paris. Toi tu te sens français, un peu trop, perdu dans ce coin où parfois t’as encore du mal à saisir ce que les habitants veulent te dire, parce que l’accent irlandais, pour le coup, c’est sûrement pire que le reste. Enfin, pour toi. Sans doute qu’eux pestent de ne pas pouvoir te comprendre dès que tu ouvres la bouche. T’essaies de faire des efforts pourtant, mais la fatigue peut prendre le dessus sans que tu la vois arriver, et dans ces moments là tu peux même passer carrément au français sans t’en rendre compte. T’en es pas encore à ce stade, cela dit, et tu espères ne pas y arriver. Mais tu peux pas non plus rester là, tu le retiens quand même, le brun. Non pas que ça te dérange, mais l’inverse n’est pas si sûr, alors tu commences à faire un mouvement vers ton vélo. “ Je devrais y aller, vous laisser profiter un peu du repas.“ Tu montres la pizza d’un signe de tête. Tu t’attends à ce qu’il hoche la tête et qu’il te salue. Ou alors qu’il parte directement, rentre dans son immeuble pour ne plus en sortir. Mais au lieu de ça, la proposition arrive, celle que tu n’avais pas vue venir. Certes tu t’y serais attendu de la part d’une cliente, parce que ça t’es déjà arrivé, même alors que t’as commencé à bosser il n’y a pas si longtemps. Sur le ton de la plaisanterie, toujours, mais avec un fond de sérieux du genre “ c’est une blague jusqu’à ce qu’il accepte, à partir de là ce sera sérieux.” Bien entendu, l’espoir a toujours fané pour ces demoiselles en question, alors que tu ne t’es jamais demandé si tu devais accepter. Le fait est c’est que dans ces moments-là, tu n’en avais pas envie . D’où la différence avec aujourd’hui. D’un côté, c’était loin d’être professionnel ou habituel. De l’autre, tu ne comptais de toute manière pas rentrer chez toi, et la proposition te donne une réponse que tu n’avais pas attendue, partant du principe que la chance pour que l’homme face à toi provoque ton intérêt et soit attiré par les hommes était pratiquement nulle. Alors soit c’était le numéro de loterie gagnant, soit ça cachait quelque chose que tu ne voulais pas connaître. Si t’as l’impression de mettre une demi-heure à donner une réponse, le silence n’a duré qu’une poignée de secondes, et tu t’empresses de répondre avant qu’il te laisse sur le trottoir à y réfléchir. “Pourquoi pas… ça me donnera l’occasion de voir si les clients aiment vraiment nos pizzas ou si c’est juste parce qu’on est les seuls sur le marché de Bray. “ Tu sais pas vraiment d’où te vient ce courage, toi t’aurais été pas loin de partir en courant tellement tu paniques. T’as pas l’habitude, t’es un peu mal à l’aise alors tu fais une blague, pour te détendre toi plus que l’autre, en vérité. Tu lui souris encore, alors que c’est la première fois, du moins t”en as l’impression, que tu te sens pas obligé de quoique ce soit. Depuis Caleb au moins. Tu suis pas ce qu’il faudrait que tu fasses mais complètement l’opposé, même en sachant pourquoi t’es sur Bray. C’est libérateur, quelque part.  
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A peine les mots avaient-ils franchis la barrière de ses lèvres qu’il le regretta. C’était vraiment une idée de merde. Déjà avec une fille ça ne serait pas passé mais, avec un homme c’était encore pire. D’ailleurs, la réponse mis plusieurs secondes à venir. Ça Maxwell savait ce que ça voulait dire, le type cherchait une excuse valable pour s’échapper. Lui-même ne s’embarrassait pas de tels détails et ne se gênait pas pour s’exprimer clairement quand il voulait quitter un endroit où même quand quelqu’un parlait et que ça l’ennuyait. Pourtant, les gens semblaient accorder beaucoup d’importance au fait de ne pas froisser leur interlocuteur, même quand celui-ci était un parfait inconnu qu’il ne reverrait jamais dans leur vie. Avec le temps, il avait appris à faire pareil avec les gens qui pouvaient avoir un quelconque impact sur sa vie. Pour les autres, ils pouvaient aller se faire foutre.

“Pourquoi pas… ça me donnera l’occasion de voir si les clients aiment vraiment nos pizzas ou si c’est juste parce qu’on est les seuls sur le marché de Bray. “

Ah tiens, un téméraire. Certaines personnes avaient un instinct de survie assez développé pour sentir que Maxwell n’était pas forcément la bonne personne à ajouter à son cercle social. Visiblement, ce n’était pas le cas du livreur. Ils échangèrent un sourire et Maxwell composa le digicode. La serrure émis un petit déclic et il poussa la porte pour entrer dans le hall de l’immeuble. Un grand miroir ornait un mur et leur proposait directement leur reflet dans une lumière assez flatteuse. Deux mètres plus loin, un ascenseur les attendait. Le médecin avait pris l’habitude de prendre les escaliers principalement pour éviter de croiser des gens. Il maitrisait les échanges de base mais, les habitants de cet immeuble avaient la fâcheuse tendance de vouloir discuter. Cette fois, la fatigue était reine et il avait un invité. En pressant le bouton il questionna le livreur sur son prénom. Après tout, il fallait bien l’appeler par autre chose que « le livreur ». Quand ils entrèrent tous les deux dans la boîte de métal mouvante, la porte de l’immeuble s’ouvrit et son voisin du bas arriva en demandant de retenir l’ascenseur. Le médecin appuya plusieurs fois sur le bouton de fermeture des portes mais à son grand malheur, l’autre idiot réussit à bloquer la porte cinq centimètres avant la fermeture.

Voilà comment Maxwell et Meursault se retrouvèrent avec un homme d’une quarantaine d’année au front dégarni dans un ascenseur pour un voyage long de cinq étages. Bien évidemment ce dernier ne semblait pas vouloir s’en tenir aux échanges de politesse de base et expliqua, non sans une certaine fierté dans la voix, que son fils avait réussi son année scolaire. Et on se demandait pourquoi il préférait les escaliers. Le médecin passa une main sur son visage et commença à compter dans son esprit. Il faisait de grands efforts ces derniers temps pour ne pas être désagréable mais, la vie continuait de le tester. Enfermé dans un ascenseur définitivement trop lent avec un idiot qui lui parlait de sa progéniture idiote alors qu’il voulait simplement discuter avec un beau français, sa patience approchait sa limite. Résultat, il n’avait pas eu le temps d’arriver jusqu’à dix qu’il lâcha sur un ton très sec :

« Je m’en contrefiche. Ta vie n’intéresse ni moi ni personne et ça ne changera jamais donc, arrête de parler »

C’était un peu brutal. A sa défense, cet homme avait osé lui parler du beau temps hier matin. Les gens manquaient vraiment d’intérêt dans cette ville. Il avait ponctué sa coupure d’un sourire qui pouvais se traduire par « ferme ta gueule maintenant ». Sa patience était donc inférieure à dix secondes. Il se souviendrait toujours de cette fois où il avait tenu une minute. La réplique qu’il avait sortie après cette minute glorieuse était rentrée dans les annales. Quoi qu’il en soit, son interlocuteur semblait choqué d’un tel affront. Les portes s’ouvrirent alors qu’il disait au médecin combien il était malpoli. Ce dernier se retourna vers lui et avec un sourire toujours aussi faux, il répondit :

« Peut-être … Mais, il fallait que quelqu’un te le dise. Et ton fils est aussi brillant qu’un poulet décapité, ne te fais pas trop d’illusions »

L'image avait le mérite d'être très parlante et directe. Heureusement, les portes de l’ascenseur se fermèrent pour éviter un conflit de voisinage. Dans l’esprit de Maxwell, il n’avait fait que lui rendre service en lui ouvrant les yeux sur la déception que représentait sa descendance. Neuf mois pour ça … Après, les chiens ne font pas des chats. Sans accorder plus d’importance à cette altercation, il ouvrit la porte de son appartement et alluma la lumière.

« Fais comme chez toi »

L’entrée donnait directement sur le salon. Un canapé en cuir était disposé face à un écran plat, de l’autre côté la cuisine ouverte semblait dominer l’espace de vie. La pièce était rangée et pour la première fois entièrement débarrassée des cartons de déménagement. Le médecin posa la pizza sur sa table avant d’enlever sa veste et se diriger vers le frigo en allumant le four au passage.

« Tu veux boire quelque chose ? »

Super première impression, bravo Maxwell.

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Meursault & Maxwell

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Tu faisais rarement preuve de courage. Pratiquement jamais, en réalité. Toi, ton truc, c'était plutôt de fuir ce qui aurait pu être une opportunité, et de le regretter à chaque instant de ta vie par la suite. Alors tu ne comprends même pas pourquoi t'as accepté de monter avec Maxwell. Peut-être parce que l'idée de rentrer était beaucoup plus forte que celle de t'enterrer dans un coin et d'attendre que quelqu'un te trouve, peut-être parce que l'attirance pour cet homme était quelque chose que tu ne pouvais pas ignorer … Le fait est que t'as fini par accepter. Tu te demandes brièvement si ça l'avait surpris. Ou peut-être qu'il le sentait, ce truc que tu dégages, cette estime de toi-même placée en dessous du sol, cette impression que personne ne peut t'apprécier parce que tu ne mérites pas de marcher à côté des autres mais beaucoup plus loin derrière. Mais s'il l'avait vu, sûrement qu'il ne se serait pas embarrassé de te demander de monter. C'est maintenant que tu voudrais partir en courant, en réalité, mais c'est un peu tard pour revenir sur ta décision, même toi tu le sais. Alors tu prends une petite inspiration et tu te décides à le suivre. Qu'Est-ce que tu aurais à y perdre, de toute manière? Qu'il te voit tel que tu te vois toi, qu'il te jette dehors ? Et alors ? Tu lui livres une pizza de temps à autre ce n'est pas comme si tu le connaissais assez pour t'attacher. Mais le fait est que t'accordes quand même beaucoup trop d'importance à ce que les gens peuvent bien penser de toi, et qu'eux ne te rendent pratiquement jamais la pareille. Mais tes réflexions - qui partaient rarement du bon côté - s'arrêtèrent là lorsque tu franchis la porte de l'immeuble. Ta mère, elle rêverait d'habiter quelque chose d'aussi chic. Faut dire que vous n'aviez pas connu la richesse, à aucun moment de votre vie, et que rien que le hall d'entrée faisait sûrement la taille de ton salon. Toi aussi, faut dire, t'aurais aimé vivre dans un tel endroit, juste pour ne plus avoir honte de là d'où tu viens. Mais faut se faire à l'idée, même Oswald, ton père - que tu considères rarement comme tel de par son absence – n'est pas le symbole même de l'opulence. Le fait est que tout endroit qui possède un ascenseur est généralement hors de ta portée financièrement parlant. On pourrait d'ailleurs argumenter par le fait que même un studio de Dragon Alley est loin de ce que tu peux réellement t'offrir. Tu entres dans le petit habitacle – pas si petit, quand on voit tes références - à la suite du brun. " Meursault. Meursault O'Neill pour être précis. La parfaite combinaison entre la littérature française classique et l'irlandais basique. " Tu n'as jamais vraiment compris pourquoi ta mère avait décidé de t'affubler d'un tel prénom. Comme si la vie n'allait déjà pas être assez dure pour toi, il fallait tout de même rajouter une assurance. T'as détesté ton prénom une bonne partie de ton enfance, faut dire. Tu voulais enchaîner pour avoir confirmation de l'identité de ton hôte quand un homme fit irruption dans l'espace déjà réduit de l'ascenseur. Si encore il avait décidé de se taire et de rester dans le silence gênant assez commun aux rencontres du genre, mais non. Le voilà qui commence à raconter sa vie sans aucune considération pour vous … Mais toi t'es trop gentil, faut le dire. Toi t'aurais jamais osé lui dire de la fermer, toi t'écoutes parce que tu penses que tu n'as pas le choix, tu souris, tu acquiesces, tu ne le félicites pas mais t'es poli. Pas franchement le style de Maxwell cependant. T'aurais presque envie de rire tellement t'es surpris, mais même toi tu sais que ça ne se fait pas alors tu ne dis rien, te contente de détourner le regard de l'homme choqué qui doit subir les foudres de l'autre. Quelque part, t'es impressionné. Toi tu ne peux pas parler aux gens de cette façon, tu te sentirais mal, tu baisserais les yeux, rien que l'idée d'une confrontation et ton cœur loupe des battements. T'attends de sortir de l'ascenseur et de voir les portes étouffer les protestations de l'homme bafoué pour ouvrir la bouche. " Tu as l'air de bien t'entendre avec le voisinage. " Une réflexion amusée, exemptée de tout jugement. Tes voisins tu ne les côtoies pas non plus, t'entends parfois le balai de la vieille du dessous taper sur le sol lorsque les engueulades se font trop bruyantes mais à part ça … Tu peux comprendre facilement que la vie en communauté peut être difficile, surtout à Bray. Mais t'arrêtes de parler lorsque tu entres dans l'appartement. Certes, t'es facilement impressionnable, mais le fait est que tu vis avec ta famille sans doute dans un espace encore plus petit que celui-là. Alors t'as de quoi remettre en perspective toute ta vie. Tu finis par capter les mots qui te sont destinés, cependant, ce serait bien que tu ne passes pas pour un idiot tout de suite. " Avec plaisir. Je ne suis pas difficile, de l'eau m'irait très bien. " Oui parce que t'es déjà dans l'appartement d'un de tes clients, prêt à manger la pizza qu'il a payée. Tu n'es pas super à l'aise sur le côté profit pour le moment. " Tu habites seul ? " Très subtil, on adore ça. Tu n'as même pas osé poser un bout de fesses sur le canapé et pourtant, tu tentes de faire la conversation. C'est honnêtement la première question qui t'es venue à l'esprit. Peut-être parce que tu es trop ancré dans ta propre vie pour réussir à observer celle des autres sans être relativement impressionné.
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Si une petite île avec une maison sympathique sans voisins et sans personne était disponible du côté de Dublin, sans doute y aurait-il déjà déménagé. Le problème étant qu’il lui fallait bien aller travailler chaque jour et voir sa mère de temps en temps. Du coup le plan de l’île n’était pas encore tout à fait opérationnel. Ainsi, il était condamné à supporter ses voisins, ces idiots complets qui pourrissaient sans quotidien par leur complète inutilité. Encore, l’éleveur de poulet décapité n’était sans doute pas le pire. Dans l’immeuble à côté, il y avait le démon, un des pires déchets que le médecin ait vu dans sa vie. Avec Dagda, ce fut la haine et le mépris au premier regard, presque immédiatement après son emménagement. Bien sûr, ils avaient réussi à entretenir la haine en se comportant comme des gamins capricieux. Jamais l’éleveur de poulets n’atteindrait un tel niveau, il y a des relations comme ça qui sont simplement uniques.

Devant le frigo, il remplit deux verres d’eau fraiche. Avec la chaleur de ces derniers jours, ses stocks d’eau restaient bien au frais à attendre son retour et le congélateur gardait précieusement des glaçons. Sans doute que sur la question de la chaleur il était plus irlandais qu’italien. Une fois les verres sur la table basse qui séparait la télévision du canapé, il ouvrit les rideaux qu’il laissait fermés en journée pour protéger son appartement du soleil bien téméraire pour une région si nordique. Il ne se demanda pas vraiment s’il y avait une quelconque idée derrière la question posée et se contenta d’y répondre en espérant que le français puisse trouver dans sa réponse ce qu’il cherchait.

« Fais comme chez toi et oui il n’y a personnes d’autre, je vis seul. Mais ma famille proche vit à Bray, celle du côté de mon père à Dublin et du côté de ma mère en Italie »

Maxwell était comme Meursault, un savant mélange européen. Sauf qu’ayant grandi en Irlande, et n’ayant appris l’italien qu’en deuxième langue, il n’avait pas vraiment d’accent. Sans doute que certains vieux irlandais trouveraient sa façon de parler américanisée après ses années passées dans le nouveau monde. Comme une partie des anglophones il appréciait l’accent français (allez savoir pourquoi) et avait sans doute une vision un peu stéréotypée de Paris.  En une semaine de vacances, il n’avait pas vraiment pis la peine de quitter les zones touristiques. Il ne connaissait pas d’autres parisiens à Bray et se disait que son livreur favori avait sans doute ses raisons pour venir se perdre dans une petite ville d’Irlande, lui-même avait les siennes.

Pendant qu’il enfournait la pizza pour la réchauffer un peu, la conversation continua sur la France, l’Italie, l’Irlande, Bray et le foodtruck. Le courant passait bien entre eux et la conversation était agréable pour ce début de soirée. C’était sans doute le paradoxe Maxwell, s’il paraissait hautain, désagréable voire franchement impoli avec une grande majorité de l’espèce humaine, il y avait parfois quelques personnes avec lesquelles il pouvait presque passer pour un type agréable à fréquenter. Mais bon, généralement le naturel revient au galop assez vite et les personnes en question coupaient rapidement court.

Assis sur le canapé, une part de pizza en main, pendant un moment de silence qui pouvait facilement être considéré comme gênant, il se remémora ce que sa mère adorée lui répétait trop souvent à son goût : essayer de faire attention aux autres et découvrir ce que chaque personne avait à offrir. Ce n’était pas rare qu’il se dise que sa génitrice était restée coincée dans le mouvement hippie des années 70 mais, il l’aimait trop pour la contredire. Du coup, le médecin se dit que c’était peut-être le moment de s’intéresser à quelqu’un d’autre qu’à lui-même. En essuyant ses mains dans une serviette, le carton de la pizza désespérément vide, il demanda à Meursault :

« Et qu’est-ce que tu fais à Bray en fait ? C’est quand même assez loin de Paris »

Bien sûr, si son empathie n’était pas aussi atrophiée, peut-être aurait-il senti que si Meursault ne l'avait pas évoqué spontanément, c'était que ce n’était pas forcément la question à poser,  ou du moins pas tout de suite. Mais Maxwell restait Maxwell et, mettre les pieds dans le plat, c’était assez habituel chez lui.


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Meursault & Maxwell

«You look like a movie, you sound like a song. My God, this reminds me of when we were young»
Tu finis, au bout de quelques instants, par t’asseoir sur le canapé. Non pas que tu te sentes encore à l’aise, tu étais très loin de l’être, mais tu n’avais pas non plus envie de ressembler à un piquet, planté au beau milieu de son salon sans savoir quoi faire de tes mains, pendues le long de ton corps. Alors tu te contentes de l’écouter. Tu es légèrement stressé, mais toutes les interactions sociales te font cet effet, notamment parce que tu n’as aucune confiance en toi et que tu es certain qu’au bout du compte, tu finiras par te rendre ridicule d’une manière ou d’une autre. Tu n’y peux rien, en vérité, c’est ce que tu es. La plupart du temps, tu t’en remets facilement, tu finis par te dire que ce n’est pas si grave, que de toute manière tu ne t’attends pas à autre chose de ta part. La plus grande tristesse, c’est sans doute que c’est vrai, tu préfères largement arriver le soir, te mettre dans ton lit en te maudissant de ne pas avoir fait quelque chose plutôt que le même résultat en voyant que tu as fait tout ton possible. Ce soir c’est différent, t’as fait un bond, mais t’es toujours pas sûr que c’était le bon choix à prendre. Sans doute pas, en vérité. Tu ne peux pas t’empêcher de te dire que tu peux facilement te retrouver à la place de ce voisin. Tu es sans doute loin d’être aussi lourd, mais tu ne dois pas être des plus intéressants non plus, et cet homme, chez qui tu es, tu es certain qu’il aime les gens intéressants. Encore une preuve que tu ne sais pas vraiment ce que tu fais là. Alors tu essaies de meubler la conversation du mieux possible. “ Irlandais et italien … C’est un curieux mélange ! De quel coin de l’Italie?” Tu ne sais pas faire la conversation, c’est un fait. Tu ne connais même pas assez ce pays-là pour te dire que tu vas forcément savoir pointer du doigt sur une carte l’endroit qu’il t’énoncera. Faut dire que tu n’étais pas le plus assidu à l’école, et le seul voyage scolaire que tu aurais pu faire là-bas, tu as dû tirer un trait dessus car ta famille était loin de pouvoir se le permettre. Mais pour être honnête, même s’ils avaient eu l’argent nécessaire, tu es plutôt certain que Richard aurait mis son veto à ton départ. Les pays étrangers, on ne sait jamais ce que ça peut faire à un homme, qu’il aurait probablement dit. Et puis les voyages, c’était surtout bien pour arrêter d’étudier pendant une semaine, mais on en tirait rien. Voilà ton casanier de beau-père qui ne t’a jamais réellement permis de faire quoique ce soit d’autre de ta vie que prendre des notes et étudier pour ne pas finir comme ton père. Vois comme ça t’a réussi, au moins c’est certain que tu te marieras pas quinze fois et que t’auras pas une équipe de foot comme enfants. “ Tu y vas souvent? Merci.” Tu devais avouer que l’eau était la bienvenue à cette période de l’année, l’été arrivait, et la chaleur montait assez rapidement. Bien entendu, tu étais plutôt habitué, Paris pouvait s’avérer être une vraie fournaise, mais ce n’est pas pour autant que tu l’appréciais particulièrement. Plus la conversation avance, plus tu te sens à l’aise, cela dit. Tu parles avec moins d’hésitations, t’es plus enclin à relancer lorsque la conversation s’affaisse un petit peu, et vous évitez les sujets qui pourraient potentiellement ruiner le moment, ce qui n’est, en fin de compte, pas plus mal. Pourtant, tu aurais sans doute dû continuer à te méfier, juste pour ne pas voir ton sourire disparaître face à la surprise de sa question. Qui était, somme toute, assez logique, tu avais bien énoncé auparavant, alors que vous mangiez, l’amour que tu portes à Paris, à sa grandeur, à son art. Forcément que le fait que tu te retrouves dans un coin perdu d’Irlande puisse choquer. “Mon père habite Bray. J’ai eu … Quelques problèmes à Paris et ma famille a convenu que ce serait mieux qu’on s’en éloigne pour un temps. ” Tu n’es pas très bon acteur, même pas du tout, en réalité. Ta réponse, bien qu’un peu évasive, montre bien à quel point cette décision t’a marqué. A quel point cette notion de “famille” était loin de t’inclure, en réalité. Toi qui n’a jamais été capable de te faire de place, ni à Paris, ni à Bray, ni nulle part ailleurs. “ Mais ce n’est pas plus mal, je peux recommencer quelque chose ici.” T’es plein d’illusions, encore, tu essaies d’y croire, même si ça sera loin d’être aussi facile que t’aimerais le penser.  
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N’importe quel observateur quelque peu informé pouvait sans difficultés se rendre compte que Maxwell était plus ouvert aux relations humaines ces dernières semaines. Il portait les espoirs de sa mère sur la phase descendante et faisait de son mieux pour ne pas la décevoir. Freud aurait sans doute beaucoup de conneries à raconter sur leur relation. Sans doute que s’il était encore à Stanford, dans l’ignorance totale de l’existence gène déficient de sa génitrice, le médecin sociopathe n’aurait jamais pris la peine d’entamer une discussion. Ce n’était pas une si mauvaise chose au final, l’entretien lui semblait plutôt agréable mais il n’avait aucune idée de si ce sentiment était partagé par le beau français assis face à lui. Les échanges pouvaient être considérés comme d’une certaine banalité mais Maxwell écoutait attentivement parler de la ville lumière et des arts. Ce n’était pas vraiment sa tasse de thé mais c’était toujours agréable d’écouter parler quelqu’un qui appréciait son sujet.

Un air circonspect sur le visage, il remarqua le sourire de Meursault disparaitre en moins d’une seconde à cause de sa question. Tiens, ça lui apprendrait à essayer de s’intéresser aux autres, c’était réussi. De toute façon, les autres avaient toujours des problèmes et le médecin ne pouvait pas vraiment être qualifié d’oreille attentive. En fait, il s’en fichait complètement des problèmes des autres, ils s’inventaient des problèmes personnels pour donner une quelconque importance à leur propre insignifiance, que pouvait-il y faire ?

“Mon père habite Bray. J’ai eu … Quelques problèmes à Paris et ma famille a convenu que ce serait mieux qu’on s’en éloigne pour un temps. ”

L’hésitation avant de parler de « quelques problèmes » déclencha une alarme dans sa tête. Ils s’engageaient sur un terrain qu’il ne maitrisait absolument pas. La politesse voudrait qu’il s’y intéresse mais, c’était trop lui demander. De base, il voulait juste le mettre dans son lit, pas tout connaitre de ses craintes et de ses doutes.

“ Mais ce n’est pas plus mal, je peux recommencer quelque chose ici.”

Recommencer quoi ? Il avait manqué une partie où est-ce qu’il était encore à côté de la plaque ? Recommencer une famille ? Ça se recommence une famille en fait ? Est-ce qu’il livrait déjà des pizzas à Paris et recommençait dans un autre endroit ? Les gens pourraient apprendre à s’exprimer clairement quand même. Il leva les yeux au ciel sans vraiment le vouloir, plus blasé par sa propre incapacité à communiquer avec un autre être humain que par les espoirs fanés de Meursault, auxquels il ne comprenait rien d’ailleurs.

« Si tu le dis … Et sinon tu habitais dans quel quartier à Paris ? »

Il s’en fichait complètement des arrondissements de la capitale française et n’y avait pas passé suffisamment de temps pour pouvoir situer sa réponse sur une carte. Il voulait simplement quitter cette pente glissante sur laquelle il ne voulait pas s’engager. Toujours aussi incapable de décrypter les émotions des autres, il avait appris avec le temps à détecter les signes avant-coureurs d’une discussion à cœur ouvert ou même de tout échange d’idée à fort caractère émotionnel. Ce n’était pas contre Meursault, c’était juste que Maxwell n’était pas fait pour ça. D’ailleurs, il se doutait de la suite des choses, il allait encore passer pour un connard, à force il était habitué.

La conversation continua plusieurs minutes avant qu’ils ne décident de prendre congés l’un de l’autre. Certain d’avoir encore grillé toutes ses chances avec une seule phrase, il ne prit pas la peine de lui laisser son numéro ou même d’aborder le sujet. Une fois la porte fermée, il se rendit directement dans sa douche, frustré. C’était fatiguant pour lui de faire tant d’efforts stériles. Toute conversation arriverait forcément à un moment pour lequel il n’était pas fait. Et les gens ne réagissaient pas bien, jamais. Ils le prenaient toujours personnellement et la situation finissait par s’aggraver. Personne ne comprenait qu’il en était tout simplement incapable, c’était comme ça depuis 30 ans et les choses n’allaient jamais changer. Les espoirs de sa mère ne pouvaient rien y faire.

Allongé dans son lit, attendant que son somnifère fasse effet, il ouvrit une de ces applications de rencontre. La dissolution des relations humaines dans un bain de wifi avait ses avantages pour quelqu’un comme lui. Désormais, avec deux photos bien cadrées, il pouvait trouver un bout de viande pour satisfaire ses envies sans avoir à retenir son prénom. C’était quand même beaucoup plus facile.

Les jours passèrent sans réelle distinction entre eux. Les patients s’enchainaient comme des numéros à l’hôpital. Le capitalisme avait contaminé les services médicaux et les médecins n’avaient plus le temps de réfléchir suffisamment sans risquer de devoir faire des heures supplémentaires. Sur son chemin, des travaux ornés d’une jolie déviation l’obligèrent à emprunter un chemin différent. Son téléphone vibra dans sa poche et le message s’afficha sur sa montre. Internet était efficace même dans une ville aussi petite que Bray, il était en discussion avec 3 types pour essayer d’en ramener un chez lui mais, les gens étaient de plus en plus méfiants avec le temps. La déviation le rapprocha du foodtruck et il décida de se garer à proximité pour prendre de quoi manger ce soir. Accumuler les pizzas n’était pas tout à fait une bonne idée mais, les Etats-Unis avaient laissé des séquelles dans son comportement. Il commanda une pizza végétarienne sans accorder un regard au type qui prit sa commande. Ce n’était pas le livreur français du coup il s’en fichait. Maxwell se contenta de rester appuyé sur le rebord du comptoir mobile à essayer de convaincre par message un gars de passer à son appartement ce soir et qu’il n’était pas un psychopathe.

Quelques minutes plus tard, pendant que les odeurs d’origan le faisaient saliver, il était prêt à concéder d’aller boire un verre dans un bar quand un vélo s’approcha. Meursault revenait de ses livraisons. Ne sachant trop ce qu’il attendait de lui, Maxwell lui adressa un signe de la tête et se reconcentra sur l’écran de son smartphone pour envoyer un dernier message « Ecoute, j’attends ma pizza au foodtruck, t’as qu’à me rejoindre dans le bar juste en face ». C’ était plutôt clair, hors de question de courir de l’autre côté de la ville. Etant le seul client à attendre, il ne devait pas être bien difficile à repérer.

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