DIS MOI D'OÙ JE VIENS ! (Brady & Utah)

J'ai pas envie. De tout ce que je suis obligé de faire, c'est certainement la chose dont j'ai le moins envie. Faire des prises de sang, me faire ausculter par plein de médecins, manger des piments, marcher sur une corde avec le vide en dessous ou même sauter d'un avion sans parachute me paraitrait être préférable à ça. Et je crois que tous mes proches le savent. J'ai jamais été curieux de savoir d'où je viens. Je ne me souviens pas si Ska, Dallas ou yukon avaient posé des questions sur leurs origines, mais je sais que moi jamais. Cela me mettait même dans une colère noire quand j'étais gamin si on avait le malheur de me demander si je n'avais pas envie de savoir d'où je venais. Ils m'ont abandonné à la naissance, représentant à leurs yeux qu'un déchet qu'on pouvait abandonner à côté d'une poubelle, dans une ruelle sombre et froide. Alors non, qu'ils aillent au diable. Ils m'ont certainement oublié dès qu'ils ont quitté cette fameuse ruelle, je ne veux pas leur accorder du crédit, ils ne le méritent pas. Ma famille d'adoption est la seule qui compte. Ils ont toujours été là pour moi. Ils m'ont élevé, nourrit, aimé et ont toujours cru en moi. Alors à mes yeux et dans mon coeur, ils seront toujours mes vrais parents. Au diable le sang et mes pouvoirs de fée, je serais à jamais leur fils. Mais voilà, je me suis éclaté la gueule en moto cross le weekend dernier et j'ai eu besoin de quelques points de suture. En soit rien de bien dramatique, mais le médecin qui m'a suivi à l'hôpital avait l'air très curieux de connaître mon patrimoine génétique. Selon lui, j'aurai peut-être une anomalie au niveau du coeur, mais vu que c'est génétique, il aurait besoin de savoir si quelqu'un dans ma famille a des problèmes au coeur avant de pousser plus loin les recherches. J'ai essayé de lui expliquer que j'étais un gosse adopté et que je serais bien incapable de lui répondre, il a quand même insisté. Le service des adoptions pourrait certainement m'aider dans mes recherches, c'était important, blablabla.

"J'vois pas pourquoi on polémique sur le sujet ! Il n'a qu'à faire son job et continuer les examens, au lieu de me les briser avec mes origines." Dis-je, installé dans le salon de mes parents. Moi ça me gonfle et je ne le cache pas. Je ne veux rien savoir d'eux et encore moins savoir s'ils m'ont refilé une de leur vieille maladie pourrave. Mais mes parents ne sont pas du même avis que moi. Au delà du fait que ça pourrait être bien que je rencontre d'autres fées, pour mon apprentissage, il est important que je sache s'il existe des maladies génétiques dans ma famille. Je sais qu'ils ne pensent qu'à mon bien et qu'ils feraient tout pour me protéger, mais je ne suis plus un gosse et il n'est pas né celui qui m'obligera à quoi que ce soit. Leur discours me saoule et c'est vexé et agacé que je m'en vais de chez eux pour rentrer à l'appart'. Je me dirige directement dans ma chambre, sans adresser le moindre mot à mes coloc'. Y'a des jours où faut juste me foutre la paix et ils ont fini par le comprendre. Je rumine durant des heures cette histoire et au matin, de mauvais gré, je décide de me rendre dans ce service ! Ils n'auront certainement rien sur moi, me rassurais-je. Une simple formalité. Comme ça je pourrais dire que j'ai fait ma part du marché, on me foutra la paix avec cette histoire et l'autre tâche fera son job. Avec le salaire qu'il doit se taper, il ne va pas me faire chier le vieux chnoc !

"Bonjour ! Je suis au service des adoptions ?" Demandais-je au mec qui me faisait face. J'ai cherché pendant longtemps avant de finir par tomber ici. J'ignore s'il fallait prendre rendez-vous ou pas et je m'en tamponne. On va arrêter de me faire chier et on va accéder à ma requête. Je ne suis déjà pas ici par plaisir, donc on va aller au plus rapide. En temps normal, j'ai toujours ma caméra sur moi, je filme toute ma vie et je choisis les passages potentiellement les plus intéressants pour faire mes vlogs. Mais pas aujourd'hui. Aujourd'hui c'est trop personnel pour le faire partager à ma communauté. Ils ne sont pas sans savoir que je suis un gamin adopté, c'est pas un secret d'état, mais je pense qu'ils auront compris que mes origines ne m'intéressent définitivement pas. Si un jour mes vrais vieux me reconnaissaient, ils savent qu'ils seraient très bien accueilli en venant me voir. J'ai jamais eu besoin d'eux jusqu'à présent, qu'ils s'épargnent la peine de venir voir si je vais bien, la réponse est oui ! Mon avant bras gauche encore douloureux, j'essaye de le bouger le moins possible. Si je ne m'étais pas planté en moto le weekend dernier, je ne serais pas là aujourd'hui. J'ai vraiment un karma de merde. "Je viens pour un renseignement ... J'aimerai avoir accès à un vieux dossier ... " J'espère qu'il ne va pas falloir attendre 15 ans pour avoir l'autorisation de regarder mon dossier. Ca serait quand même le bouquet alors que c'est le mien, j'en dispense comme je le veux que je sache !

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-Bonjour, vous êtes bien aux archives du service des adoptions. Que puis-je faire pour vous aider ?

Il y avait deux types de demandes les plus courantes : celles qui étaient faites pour quelqu’un d’autre et celles de gens directement concernés par l’adoption (adoptants ou adoptés confondus). Le deuxième type de requête était très reconnaissable. Les gens étaient moins à l’aise, plus hésitant sur leur façon de demander un dossier, moins confiants dans leur recherche… Brady aurait parié que l’homme face à lui était de ceux qui venait pour quelque chose de personnel. Il avait l’air mal à l’aise, presque ennuyé d’être là.

Brady pouvait en témoigner, chercher des éléments sur son passé n’était pas toujours évident. Il fallait arriver à faire le point sur ce qu’on voulait vraiment savoir ou pas. Quand on est adopté, en savoir plus sur ces origines reviens à se jeter dans l’inconnu. Ce qu’on va trouver risque d’être assez mauvais pour que ça finisse par une adoption mais personne ne vous prépare à ce que ça vous fera de le savoir. C’est pour ça que l’archiviste essayait de procéder avec autant de délicatesse quand il demandait des précisions à ceux qui venait le trouver.

-Bien sûr, de quel dossier s’agit-il précisément ? S’il s’agit du votre, j’aurais besoin d’une pièce d’identité je vous prie.

Le métamorphe se souvenait parfaitement du moment où il avait ouvert sa propre boite de Pandore. Encore qu’il n’avait pas à se plaindre, il était déjà au courant qu’il avait un frère quelque part dans le monde. Il aurait pu avoir une surprise bien plus énorme en ignorant absolument l’existence de Dagda avant d’ouvrir le dossier. Brady avait suffisamment eu un choc en découvrant que son frère avait fini en prison mais il n’osait penser à ce qu’il se serait passé s’il n’avait pas su qu’il avait un frère du tout. Quelque part, peut-être que ça aurait été mieux. Au moins, en découvrant la vérité il n’aurait pas vu tous les rêves qu’il avait eu pour son frère disparaitre devant la vérité bien moins reluisante. Peut-être que s’il n’avait jamais su, il n’aurait pas eu envie de combler cette absence avec autant d’acharnement. Enfin, il n’était pas question de lui en ce moment mais de son invité. Puisque celui-ci avait l’air particulièrement mal à l’aise, Brady allait faire de son mieux pour lui rendre sa rencontre avec son passé aussi indolore que possible.

-Est-ce que je peux vous offrir quelque chose à boire le temps que j’aille chercher ce que j’ai pour vous dans les archives ?  

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Bon, déjà je suis au bon service, c'est toujours ça de pris. Ca m'aurait vraiment gonflé si l'autre en face m'avait annoncé que je m'étais trompé et qu'il fallait encore que je parcours la moitié du bâtiment pour trouver mon bonheur. Non pas que la marche me pose problème, même avec mon bras, mais j'ai déjà pas envie d'être ici, si en plus je dois parcourir en long en large et en travers ce maudit lieu, je vais vite rentrer chez moi et tant pis pour le dossier. Je n'aurai qu'à mentir et prétendre qu'il n'y avait rien dedans. Pour le médecin en charge de mon dossier, ça me passe un peu au dessus de lui mentir, je ne le connais pas, j'aurai pas grandes états d'âme. Pour mes parents, ça sera autre chose. J'aime pas l'idée de leur mentir. Ils ont toujours été réglo avec moi et on toujours tout fait pour nous, leur mentir serait leur montrer que peu de considération et ce n'est absolument pas ce que je pense. Mais vu que je suis dans le bon service, je suppose que je n'ai pas à me prendre la tête avec cette histoire. "Oui j'aimerai consulter mon dossier. Utah Wright." Je sors de ma poche mon portefeuille et lui tends ma carte d'identité. J'ai pas donné mon second prénom, je ne vois pas l'utilité à cela. Je doute qu'il y ait 15 milles Utah Wright dans le coin. Déjà que des Utah, à Bray, je pense que je suis le seul, alors y'a pas trop de risques de confondre avec quelqu'un d'autre. Après, je peux me tromper, Bray reste une grande ville, pas aussi importante que Dublin mais quand même. De toute façon mon second prénom, Oswald, se trouve inscrit sur ma carte d'identité, donc bon, ça règle l'histoire.

"Un café ne serait pas de refus ... Merci !" Au vu de la nuit que j'ai passé, le café ne sera pas de trop. Pour le moment je tiens éveillé par le stress et la non-envie d'être ici mais une fois que j'aurai achevé ma tâche, je suppose que la fatigue va venir me rappeler à son bon plaisir. Le mec disparaît et je me retrouve seul avec moi-même. Je m'étais toujours promis de ne jamais venir ici. Enfin, je ne savais pas qu'il existait un service dans le genre, même si en soit il n'y a rien d'étonnant à ça, mais ce que je veux dire c'est que jamais j'ai envisagé de chercher mes origines. Je m'en fous de qui sont mes parents. Ils ont fait le choix de m'abandonner à la naissance, je n'ai aucun compte à leur rendre. Mais maintenant que je suis ici, je ne cache pas qu'au fond de moi, une petite voix à envie de savoir la vérité. Pourquoi ? Pourquoi deux personnes ont fait le choix de laisser leur enfant, nouveau né, dans une ruelle sombre de Bray ? Est-ce qu'il leur est arrivé quelque chose ? Est-ce qu'ils ne me voulaient pas ? Il existe d'autres façon de se débarrasser d'un enfant. Alors certes, ils ne m'ont pas tué, comme certains le font, mais je suppose que j'ai eu beaucoup de chance et que sans mes parents adoptifs, je serais mort à l'heure qu'il est ! Je sais que l'adoption remonte à 27 ans mais je trouve le temps long. Après j'ignore comme tout cela est fait, comment c'est rangé et le nombre de dossiers. Et puis pour être honnête, je n'ai plus trop la notion du temps, alors peut-être qu'il s'est écoulé 20 minutes comme 3. Et puis finalement il émerge de nouveau des entrailles des archives "Vous avez réussi à mettre la main sur mon dossier ?" Lui demandais-je un peu curieux ... et nauséeux.

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