#10 Take us down and all apart, Cherry Tree. - Adam&Vali

Un écho, dans cette immensité noire.
Un réveil aveuglé par la lumière dense, mais rien d’autre. Il ne peut pas courir, ni respirer. Il sent seulement que petit-à-petit, il est arraché de nouveau à ce monde. Dans cette luminescence prodigieuse, il y a l’esquisse d’un sourire.

Enfin.

À croire que son blondinet avait pris tout son temps pour le ramener. Adam ne lui en tient pas rigueur. Il est vrai que cela demandait un effort déjà à trois magiciens, alors un seul. Au milieu du salon, au numéro dix de West End, les arbres s’agitaient, remuant faiblement alors qu’aucun vent n’était prévu ce soir. Le bois du parquet se met à craquer, de même que pour celui des charpentes. Il était de nouveau apte, et dès lors que l’aura fut en mesure de tisser un corps bien matériel, une certaine impatience le prit. Une coquille qui se forge, à l’aide des feuilles, des fleurs et du bois aspiré au cœur du cercle magique. Beaucoup de lumière, ternit par l’âme haineuse du Djinn qui revient après une longue absence. Ses yeux s’ouvrent ; Rien n’avait bougé. Le piano en ébène trônait toujours au centre de la pièce, et un fin filet de poussière le saupoudre.
Les fleurs séchés décorées ici et là, et cela ne l’étonne guère. Il fallait se douter que son blondinet n’allait pas s’occuper de celle-ci. Une envie d’essayer, de savourer, tandis que sa main se tends vers les vases et traces un trait. Ses doigts sont plus fins, mais il ne le remarque que lorsqu’il cesse de tirer sur les ficelles pour rendre de la splendeur à cette dernière.

C’est une main de femme !
Oh, misère, voilà une bien basse façon de lui rendre la monnaie de sa pièce. Blessée dans sa fierté, mais suffisamment digne pour garder la tête haute, il lui faut un petit temps pour réaliser également qu’elle était dans le plus simple appareil, contrainte de rester plier en deux au milieu du cercle, son bras par dessus cette poitrine, pour cacher le nécessaire. «Vali, tu m’expliques à quoi tu joues ?» Son regard se relève en direction du magicien.

Son magicien.

La couleur dorée de ses yeux s’effacent pour laisser place à un bleu profond, changeant du tout au tout avec l’automnale. «Je ne t’ai pas donné mon cercle d’invocation pour que tu t’amuses avec.» Lâcha-t-elle sèchement, n’osant pas se lever. Adam était trop fier, trop égocentrique pour se promener totalement nue. Même dans sa propre maison. «Tu ne voudrais pas me couvrir plutôt que de me dévisager avec ton air satisfait ?» Un fin orage de colère, tandis qu’elle attends que cet idiot se décide à la rendre on-ne-peut-plus présentable. Cela dit, avec du recul, il n’y avait rien de féminin dans ce manoir. Rien qui pourrait le rendre présentable sans s’évader pour faire quelques courses. Mais il était tout bonnement hors de questions qu’elle sorte dans cet état. Les bras toujours croisées, elle lève un regard vers le ciel, non sans ménager son agacement. C’était ridicule, et elle pourrait presque réduire ses jambes en bouillie pour se venger si seulement elle n’avait pas cette électricité qui la parcourt dès lors qu’elle tente d’utiliser sa magie contre celui qui l’a invoqué.
Voilà pourquoi elle avait longtemps hésité. Pourquoi elle appréciait n’avoir ni dieu, ni maître, au détriment de sa magie. Magie qu’elle ne devait pas non plus utiliser à la légère, même si sa frustration silencieuse faisait grandir dangereusement les fleurs qu’elle avait soigné. Les voilà à grimper sur les murs, tissant ainsi un véritable tapit végétale en s’accrochant à la tapisserie. Si elle ne pouvait pas se venger sur Vali, elle allait le faire sur le mobilier.

Cela lui importait peu de toute manière, il y avait des gens qualifiés pour réparer les dégâts. Adam ne cessait de fixer, l’écoutant plus ou moins. Après tout, c’était toujours le même contrat. Et donc, ce sera toujours la même faille. Son blondinet peut seulement s’estimer heureux d’être toujours cette exception à ses yeux pour ne pas s’attirer les foudres du Djinn.

Serait-ce ; Le malaise ?
Il y a de forte chance. Repliée sur elle-même, Adam fusillait du regard Vali. Elle était tout bonnement incapable, avec ce changement brutal, de déclarer si elle était satisfaite de lui, ou bien si elle aurait préféré qu’il la laisse là où elle était si tel était son châtiment pour l’avoir pousser à le “tuer”. Elle avait froid ainsi, mais pas au point de se mettre à grelotter. Elle avait la haine contre lui, mais pas au point de vouloir l’assassiner. Elle était perdue, mais pas au point de se larmoyer. La Belladone restait statique, essayant de croiser son regard avec un miroir, ou quelque chose qui serait capable de refleter son image actuel. La vitrine de la biblithèque avait suffit, et elle avait laissé échapper une grimace. Non ! Mais non ! Blonde aux yeux bleues, les traits du visage fin, des mensurations presque parfaite... Nom de dieu, il avait l’impression de ressembler à sa mère, ou à ses soeurs. Ou encore, d’être échapper d’un film pornographique. Juste : Non ! Vivement, ses yeux bleues se figent sur Vali, n’osant pas bouger. Qu’avait-il fait, malheureux ? Même si son apparence et sa voix avait changé, Adam restait elle-même. C’est-à-dire désagréable quand quelque chose ne lui plaisait pas. Sa remarque accerbe n’était visiblement pas passé dans l’oreille d’un sourd, mais elle n’avait eu qu’une moitié de réponse.

Aussitôt avait-elle demandé -pour ne pas dire “ordonner”- d’être habillée, son blondinet était partit pour revenir avec un sac alors qu’elle demeurait figée dans son cercle d’invocation. Fierté oblige, elle n’osait pas le dire de vive-voix que tout ceci était embarrassant, et qu’elle se sentait presque trahis d’être affublée d’une telle scène ridicule.
Pour du coup, Vali avait été imaginatif : il avait trouvé une façon plus original de la punir, et plus original, que son précédent magicien en plus de vingt ans de bons et loyaux services. C’est génial, je suis trop fort, ces mots lui reviennent en tête, et elle rebondit enfin dessus après s’être perdu dans ses pensées. «Parles pour ta personne...» Un murmure plein de sous-entendu alors qu’elle détourne son regard pour le concentrer sur autre chose. Ses yeux fixent le cercle d’invocation dans lequel elle baignait, étudiant les détails, la minutie employée, presque étonnante pour quelqu’un d’aussi bordelique que son magicien. Elle relève la tête, regarde ce sac, puis Vali à tour de rôle. Les aller-retour rythmés de son regard voulaient bien dire que si, il allait devoir se tourner, car elle n’allait pas se déployer et éclore sous ses yeux juste pour son bon plaisir.

Être désemparée l’avait rendu farouche, cette djinn blonde platine.
Cela dit, les faibles courrants d’air froids la poussaient à se faire violence.

Ses lèvres se tordent faiblement, unique signe d’une rage intérieure qui bouillonne, prête à lui exploser au visage s’il continue de se moquer d’elle ainsi. Car oui, cette façon qu’il avait de la dévisager et ses yeux de merlan fris lui donnaient l’impression d’être devenue la proie et non plus le prédateur. Elle reste la dirigeante dans ce manoir, le pillier de toute cette fortune. Elle doit avoir une demi-douzaine de courrier à répondre avec son temps d’absence d’aillleurs à ce propos. Elle avait une morgue à récupérer, mais elle ne pouvait pas y aller dans cet état. Quelle perte de temps. Aussi, autant économiser les minutes, et se lever. C’est Adam qui se tourne, faisant dos à Vali une fois sur ses deux jambes.

Plus petite aussi.
Cela va vite être insupportable.

Elle fouille dans ce sac, craignant le choix des tailles. Si la culotte était passée étonnament bien, elle grimace de lassitude face à l’incapacité de fermer les agraffes de soutien-gorge, même en forçant un peu. Même un corset aurait été plus agréable à mettre. «Cela va vite m’agacer. Quoi que, c’est déjà le cas cela dit.» Par-dessus son épaule, elle jette le soutien-gorge trop petit, abandonnant l’idée de réussir à le mettre. Elle préfère boutonner une chemise -trop grande cette fois-ci- et enfiler les collants à défaut d’avoir une jupe qui tient autour de sa taille. «C’est toujours mieux que pas couvert du tout...» Soupira-t-elle, abandonnant les pieces de vêtements trop petites et trop grandes en les remettant dans le sac. Habillée, elle retrouve un tant soit peu de prestance, se permettant dorénavant de bouger pour errer dans la maison afin de vérifier que tout soit en ordre. «Ravis de te revoir. Si nous passons au-dessus de cette petite farce bien entendu. Mais ce soir, ce sera de passer. Enfin ... Je suppose ? Combien de temps vas-tu m’imposer cette apparence ?» Un soupçon de crainte ? Possible. Si Adam ne laisse rien transparaître, ce visage à visiblement la sale manie d’être plus expressif que le bon. Difficile donc de faire comme si de rien était avec ces grands yeux de poupée.

Elle ne fait pas la fière, blottie contre elle-même, entourée par les tracés à la craie.
Pourtant, elle se force à faire comme si. Comme si cela ne l’atteignait pas, comme si cela ne suffisait pas pour l’abattre. Ce n’est qu’un mauvais moment à passer. Elle relativise, fermant les yeux et soupirant pour évacuer toute cette colère qui ne demande qu’à exploser. Quel idiot ! Quel ... Crétin ! Peut-être aurait-elle dû y réfléchir à deux fois avant de lui confier son cercle d’invocation. Le murmure qu’elle a soufflé ne passe -malheureusement- pas dans l’oreille d’un sourd, et ses yeux océans se dirigent vers son blondinet qui tente tant bien que mal de la rassurer. T’en fais pas tu vas pas toujours rester comme ça. On verra pour une autre invocation un peu plus dans les regles même si je t’avoue que je suis vraiment pas mécontent du resultat. Il y a au moins quelqu’un d’heure dans cette histoire. Les mains de la djinn se lèvent vers le plafond, avant de se baisser aussitôt. «Le contraire m’aurait davantage étonné... Cela dit, ce n’est pas cela qui va m’empêcher de te rappeler qui à le pouvoir ici.»

Si Vali voulait jouer avec les sous-entendus, ce n’est pas Adam qui allait se retenir pour filer la pique subtile. Son menton s’était légèrement relevé, flattée mais bienséante. En parfait contrario avec le fait qu’elle n’avait rien sur le dos. Elle s’était même permise d’étirer un vague petit sourire, elle-aussi ayant quelques idées qui lui traversent l’esprit. Et qui ne risque pas de plaire à son blondinet... Avant de se souvenir qu’elle ne pouvait plus utiliser sa magie contre lui. Elle peste intérieurement, puis décide de se lever pour remédier à ce froid qui la guette. Mais aussi, pour “punir” à son tour son magicien d’un tel affront, notamment en le privant de la plaisante vue.
Problème de taille, dans tous les sens du terme. Soit trop grand, soit trop petit, elle profite d’avoir le dos tourné pour laisser la frustration déformer son visage. Wow désolé je pensais que tout allait etre bon mais … jme suis trompé dans les tailles. Il faudra qu’on aille racheter des trucs alors ou échanger ceux qui sont pas a la bonne taille. «Hors de question que je sorte dans cet état !» Avait-elle rétorqué du tac-au-tac en haussant un peu le ton, laissant ainsi son malaise prendre le dessus sur son volume habituel.

Elle se rétracte ausstôt, abandonnant le tout pour se contenter du stricte nécessaire. Ses bras se croisent sous sa poitrinne, gênante. Comment faisaient-elles pour se mettre à l’heure aise ? C’est tout juste si elle avait de la place pour les croiser sans avoir un poid sur les bras. Affreux, en plus d’être gênante du coup. Cela dit, on peut féliciter le sérieux à toute épreuve dont fait preuve Adam. Certes, elle est dorénavant à Vali, c’est indéniable. Mais elle espérait qu’il ne fasse pas n’importe quoi comme il était en train de le faire ici présent. Un mois ? Ouais un mois c’est bien. Je veux que tu me tienne compagnie comme ça pendant un mois. Tu vas tenir le coup c’est bon ? «Un mois ?! Mais Vali, qu’est-ce qui t’a prit ? » Sa froideur vacille, et elle manque de s’écrouler. Un mois c’est ... Long ! La djinn détourne le regard, ne sachant où le mettre. «Ai-je vraiment le choix, ou bien est-ce seulement par politesse que tu me poses la question ? Non. Non, ce n’est pas bon. J’ai l’impression d’être dans la peau de mes soeurs. Ou pire, de Mère ! Je...» Elle ne finit pas sa phrase, soupirant de plus belle. Elle lui devait au moins cela. Et puis, c’était Vali. Adam pouvait bien faire un effort pendant un mois. «Bien sûr que je vais tenir le coup, je suis le roi de la terre.» Elle retrouve cette arrogance dans son regard, mais elle était fière de ce titre. Bien plus maintenant qu’elle pouvait user de sa magie.

Ce n’était pas si chère payé avec du recul.

－J’ai hâte que tu me rappelles ça tiens.
Sa tête se tourne, et elle dévisage son blondinet qui ne semble pas être plus terrifié que cela à l’idée de se retrouver potentiellement attaché avec une femme qui ne prend pas compte de son changement d’attribut. Cela pourrait donner lieux à des situations bien déplaisantes en plus d’être malfaisante pour le restant de ses jours. Pire encore que le fameux coups des chaînes. Après une séance habillage pas catastrophique mais presque, il avait fallu que la Djinn hausse le ton pour faire comprendre que le magicien allait avoir à faire à une caractérielle personnalité peu ravie par la surprise. Pour ne pas dire totalement dépourvu. Et Dieu sait que Adam a une sainte horreur de ça, d’être complètement démuni et sans aucun contrôle. D’accord j’irais les échanger mais il faudra me dire les tailles parce que j’y connais rien. «Tu n’auras qu’à les prendre toi-même.» Tranchant, il y avait néanmoins un sous-entendu suffisamment amusant pour qu’un éclat de malice illumine les yeux de la Belladone. Les bras croisés, un semblant de sourire malicieux apparaît. Après tout, bien qu’elle ait accepté le collier et la laisse, cela ne veut pas dire qu’elle n’a pas le droit à quelques caprices.

Ce n’est qu’un mois.
Ce n’est pas la mer à boire.

Adam ferme les yeux, et tentes de contenir cette rage qui ne cesse de gratter à la porte. Elle est si dense, si présente, qu’il est difficile pour elle de l’ignorer totalement. Jusqu’à ce qu’elle s’apaise en voyant que la porte demeure fermer. La colère abandonne l’idée de forcer l’ouverture, et elle se rend. Quoi tu aurais préféré plus ? J’me suis dis que ça pourrais être amusant, et puis … C’est rien comparé au coup de chaînes tu te souviens ? «Oh, cette fois-là... Je ne vois pas de quoi tu parles. Ce n’est pas comme si je n’étais pas venue te détacher. Qu’entends-tu par “plus” ?» Son blondinet aurait été capable d’avoir une idée plus humiliante encore que celle-ci ? Hum, peut-être ne voulait-elle pas savoir en fin de compte. Cela serait dommage, maintenant qu’elle avait retrouvé sa nonchalance habituelle. Elle se force à relativiser, à ne pas penser à la longueur que cela pourrait être, un mois dans cette enveloppe charnelle déformée, remodelée au bon vouloir d’un fantasme purement humain.
Sentant des bras l’enlacer, elle arrête ses cents pas. Elle se fige, alors que ses doigts glissent sur cette ceinture de chaire qui l’agrippe. Ne pensons pas a elles, reine de la terre. De toute façon tu es libre maintenant. Une légère grimace apparaît au mot “reine”. Il allait lui falloir un petit temps d’adaptation pour qu’elle réussisse à s’y faire.

Cela dit, la perspective d’obtenir vengeance la berce.
Sa rage est détournée, dirigée vers ce ramassis de pourriture qu’est les Belladone. Particulièrement Amanda.

Elle se délecte de la voir décharnée sous ses coups, tout comme elle avait réduit à néant James. Cependant, elle ne pouvait rien faire dans cette enveloppe. Car le but était aussi de continuer à avoir la main-mise sur la fortune anglaise. «Hum, oui. Beaucoup plus libre pour manœuvrer également. Je vais tout leur prendre, couper toutes les valves, et ensuite je la tuerais.» Sa tête se penche en arrière, prenant appuie sur l’épaule du blondinet. «Cette fois-ci, je ne te retiendrais pas. Et je ne te demanderais pas de me retenir non plus. Cependant, tu ne m’en tiendras pas rigueur ; Mais je manque terriblement d’exercice.»

Aussi, elle commencera par s’entraîner ici, à Bray.
Sa liste noire s’est agrandie depuis, et son cher voisin avec son homme de main en fait partit dorénavant.