Le deal à ne pas rater :
Pokémon EV06 : où acheter le Bundle Lot 6 Boosters Mascarade ...
Voir le deal

 

 I've got you brother | ft. Mortimer

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas 
avatar
Invité
I've got you brother
We've taken different paths and travelled different roads I know we'll always end up on the same one when we're old
(c)blackarrow (c)vocivus

Chaque fois, c’est la même chose, la même angoisse. On aurait pu croire qu’avec quinze ans de plus et un an d'autoflagellation depuis ton retour, tu aurais fini par t’y faire, et pourtant t’étais encore avachi dans ta loge, deux bouteilles de rouge vidées à tes pieds et ton nœud papillon par terre, à attendre le fatidique c’est bientôt ton tour. Y’a des jours où t’aimais ça pourtant. Il y avait quelque chose d’exaltant à obtenir ces regards admiratifs, à oublier tout le reste le temps d’un instant pour exécuter ce numéro que tu connais par cœur. Tu aimais ça, cette ambiance tamisée, cette tension silencieuse, cette attente – ce moment où de rien tu devenais quelque chose, et de cafard tu redevenais humain, et étirait cette masse de muscles de sous un drap, coupant les souffles, une fois encore. Tu faisais rêver des gosses, tu avais beau les préférer de loin c’était toujours quelque chose, leur stupéfaction naïve devant des oiseaux, des cartes, des foulards colorés qui semblaient défier toute logique à sortir de tes manches. Tu aimais ce numéro, et tu l’incarnais entièrement, il n’y avait pas de Trevor le magicien sans Trevor, et pourtant. Pourtant malgré tout ça, c’était la culpabilité qui te rongeait. Tu avais toujours la peur au ventre, la peur de monter sur un piédestal et de t’en faire descendre sous les huées. Convaincu au fond de tes tripes que tu ne méritais pas cette gloire, que ton seul succès, tu le devais à un mensonge. Tu ne disparaissais pas, tu devenais un insecte répugnant, voilà ce qu’ils avaient la bêtise d’applaudir. Ce n’était pas un exploit, rien dont tu puisses sincèrement te flatter, et qui te mettait la boule au ventre. Et tu voulais changer.

Un autre soir, un spectacle de plus. Un salut final, par tous les artistes et combien plus méritants, puis le retour en loge, en sueur, tête basse et soupirant. Tu détaches ce foutu nœud violet, retire ta veste, et vide dans ta gorge 75cL d’eau d’une traite, en compensation de tout ce que tu avais pu t’enfiler avant, et parce que tu avais la bouche affreusement sèche. Le stress retombe net, bien que le malaise plane encore – c’est fini, encore, mais tu as peut-être moins de 24h avant ton retour sur scène. Peut-être pourrais-tu manquer le spectacle du lendemain ? Cela aussi, c’était dans tes habitudes, sécher tes propres apparitions, au point de provoquer des railleries autour de l’homme capable de disparaître, l’homme invisible qui s’efface lors de ses propres représentations. Combien de réprimandes, de menaces, de mots de haine. Et ton passage en prison n’avait pas rendu les gens beaucoup plus tendre, c’était même tout le contraire. Rester un personnage public dans ta situation relevait du masochisme, et tu semblais vraiment le seul à en être conscient. Il fallait que ça change. Il fallait que ces regards arrêtent de peser sur toi, à force tu n’arrivais plus à distinguer l’admiration du mépris et ça te rendait malade. T’avais toujours été trop sensible pour la scène. Mais voilà, c’était pas vraiment une vocation personnelle. Ça avait un autre sens, pour les McQueen, et il fallait être un McQueen pour le comprendre. T’avais déjà trop à te reprocher, à ton sens, c’était un peu le seul lien qu’il te restait avec l’ancien Trevor. Celui qui était déjà une brute d’accord, qui avait fait des tas de connerie, et qui avait peut-être pas autant le cœur en compote – surtout, celui qui n’avait jamais tué personne. Qui l’avait peut-être voulu, mais comme on souhaite qu’un prof se pète une jambe. Pas celui qui s’était mis des familles à dos dans cette ville, pour leur avoir arraché des parents, des enfants, des amis. Pas celui qui avait détruit des vies en détruisant la sienne.

Il était là Mortimer ce soir, il passerait te voir, il te l’avait dit. Tu sais pas vraiment s’il a assisté au spectacle, quelque part tu espères qu’il a échappé à ce massacre, et qu’il t’en touchera pas un mot. D’un regard d’enfant, c’était peut-être une merveille, mais l’ivresse n’avait pas dû échapper aux plus vigilants comme chaque fois – cela faisait un moment que les rumeurs se faisaient un peu plus bruyantes. Il faut dire qu’avant la taule déjà, tu avais fait scandale à quelques occasions. Touchant à la drogue, quelques fois illégale, pour échapper à la pression et te donner un genre. T’étais jeune et con ; con tu l’es toujours, mais t’as pris trop d’âge pour péter ta santé à ce point. Même si ça t’arrive encore, on va pas se mentir. Tu saisis ton téléphone, lisant rapidement les messages que tu as manqué. Tu te sens nerveux en arrivant sur le nom de ton frangin – ça aussi, c’est devenu commun, de réfléchir avant de lui envoyer un message, et c’était pas ton genre de réfléchir pourtant. « J’suis dans ma loge. Tu m’apportes un casse-dalle ? J’ai rien avalé avant. » Tu lâches le téléphone, l’envoyant bouler sur le pouf qui te sert de fauteuil, et tu passes à côté te rincer le visage, et retirer la couche de maquillage destinée à cacher toutes les imperfections de ta sale gueule ; une autre couche de mensonge. T'as presque envie de retarder le moment où il passera la porte, où tu vas recroiser ses yeux encore. Où tu vas devoir trouver le cran de lui dire : j'abandonne.
Revenir en haut Aller en bas
avatar
Invité

Like old friends

« J’suis dans ma loge. Tu m’apportes un casse-dalle ? J’ai rien avalé avant. »
Mortimer regarda l’horloge sur son mur et lança un juron. Il était chez lui, à travailler. Lire un article passionnant sur la décomposition des chenilles, plus précisément. Et il n’avait pas vu le temps passer. Il avait promis à Trevor qu’il passerait le voir. Il avait même prévu de voir le spectacle, à la base, mais il avait oublié. Pendant une seconde, il pensa sérieusement à ne pas répondre, ou se trouver une excuse pour reporter le rendez-vous. Mais il soupira, ferma son ordinateur et se leva. Il avait promis. S’il ne tenait pas ses promesses envers Trevor, quel genre de frère était-il ? La relation entre les deux McQueen était déjà assez compliquée et tendue comme ça. Il n’était pas question d’en rajouter inutilement.

Son armoire n’était pas remplie de « casse-dalles ». C’était mauvais pour la santé, alors Mortimer préférait cuisiner. Mais il y avait des barres de céréales chocolatées, pour ses petits creux durant les journées chargées à la police. Il en saisit une, puis deux, puis haussa les épaules et prit le paquet entier. Après tout, vu la carrure de Trevor, un casse-dalle pouvait tout aussi bien équivaloir à 1 kilogramme de sucres rapides.

La nuit était déjà bien entamée. Mortimer courut presque pour rejoindre Dragon Alley et la salle de spectacle. Il espérait que Trevor ne lui en voudrait pas d’avoir loupé le spectacle. Il n’était pas vraiment question de lui expliquer que la décomposition des chenilles dépendait en fait de l’ensoleillement qu’elles avaient reçues durant leur existence, et que c’était passionnant. Trevor le renverrait chez lui avant même que Mortimer ait pu finir. Trevor, il n’était pas intellectuel. Tous ces trucs-là, il trouvait ça ennuyeux. Mortimer avait abandonné depuis longtemps l’idée de l’intéresser à la science. C’était son truc, à lui.

Quand il arriva près de la salle, il croisa un jeune couple. Ils sortaient du spectacle et le commentaient avec de grands gestes. Ils avaient l’air excités et contents. Mortimer sourit. Il adorait voir ces têtes-là, quand il faisait partie du spectacle. Enfin, il n’en avait jamais complètement fait partie. Il avait toujours préféré l’ombre, organisant les numéros, s’assurant que tout se passe sans accroc. Mais quand il voyait les gens sortir en souriant et dire du bien de ce qu’ils avaient vu, alors l’adolescent qu’il était savait que ça valait le coup. Les McQueen valaient quelque chose ces soirs-là. Ils étaient invincibles et magnifiques.

Il entra dans la loge de Trevor le sourire aux lèvres. Il lui tendit le paquet de barres aux céréales puis s’assit sur le fauteuil à côté de lui.
« J’ai croisé des gens qui ont vu le spectacle, ils avaient l’air ravis. T’as encore fait mouche ! C’est vraiment super. J’ai loupé le spectacle, je suis désolé, j’ai eu un empêchement. Je viendrai au prochain. Mais c’est génial, tu….ça va ? »
Mortimer s’était arrêté de parler, intrigué par l’attitude de Trevor. Le grand gaillard semblait nerveux, il rentrait les épaules, il le regardait à peine. Trevor avait cette attitude, mais avant les spectacles, avant d’entrer en scène. Pas après. Mortimer n’avait pas l’habitude de voir son frère comme ça. Trevor, il aimait bien faire le gros dur. L’habitude de la prison, en partie. Et puis, Trev, c’était les muscles, et il cherchait toujours à s’en servir. L’attitude qu’il adoptait amena Morti à avoir un réflexe de grand frère : il se leva et tendit la main pour la poser sur l’épaule de Trevor, dans l’espoir de le calmer un peu. Sur le moment, il se dit qu’il venait littéralement de signer son arrêt de mort. Mais il était trop tard maintenant.


code by EXORDIUM. | imgs by tumblr


Revenir en haut Aller en bas
avatar
Invité
I've got you brother
We've taken different paths and travelled different roads I know we'll always end up on the same one when we're old
(c)blackarrow (c)vocivus

Il avait pris son temps le saligaud, il avait dû t’oublier, se perdre dans un bouquin, ou te renier tellement t’avais massacré ton numéro - il était déjà parti se doucher à la javel et tu l’enviais, parce que c’était un peu ce qui te démangeait de faire quand tu libérais tes épaules de ce costume ridicule. Ce que t’étais beau et rayonnant dans tes paillettes et tout en noir, comme une pluie d’étoiles sur le firmament nocturnal, ces strass que tu projettes dans les yeux du monde pour qu’ils voient pas l’épave qui se cache dessous. Faux, tu te trouvais immonde. L’habit n’a jamais caché le monstre, voilà ce que te crie la glace. C’est fini, stop, j’arrête. Ça aurait pu être seulement la fois de plus, un énième découragement qui pour autant ne t’empêcherait pas d’être au même endroit le lendemain soir, à répéter le même découragement comme s’il était neuf, comme s’il n'allait jamais mener à rien. Tu avais envie de te dire que c’était la fois de trop, que c’était la bonne cette fois, que si tu n’arrêtais pas là tu finirais par péter les plombs et que c’était ton ultimatum. Mais la lâcheté revenait éclore dans ton ventre à mesure que Mortimer se faisait attendre, elle te faisait hésiter. Tu te mettais à penser qu’un spectacle de plus ne tuerait personne, et ça t’évitait d’avoir à prendre une décision. C'était pourtant pas une solution de fuir indéfiniment, tu te mettais à y penser constamment : ce qui auparavant ne te torturait l’esprit qu’avant de monter sur scène - désormais te bouffait l’intérieur des tripes du lever au soir, et t’interdisais de fermer l’œil. C’était de pire en pire, ça se lisait jusque dans les traits de ton visage, bien après la tombée du rideau ; encore même, quand ton frère à la bourre a fini par passer la porte.

Tu étais encore abattu, encore dégoûté, nauséeux de toi-même, les épaules rentrées. Ton regard découragé, qui veut lui dire tu l’as pas regardé, hein ? Cette déception mêlée de soulagement. L’impression que tu te ronges les sangs pour un spectacle dont il en a déjà plus rien à foutre. Je viendrai au prochain dit-il, il vient te flatter, te rapporter des compliments, et tu aimerais t’en sentir fier mais ta gorge se noue plutôt. Tu n’arriveras pas à lui dire. Tu n’arriveras pas à venir casser cet enthousiasme, même pour un spectacle qu’il a pas fait l’effort de venir voir, qu’il a oublié parce que c’est pas lui qui se l’inflige nuit et jour incessamment dans un coin de crâne. Pourtant quand sa main se pose sur toi, tu te sens si mal que tes lèvres se détachent l’une de l’autre, avec peine et c’est fou, c’est insensé, tu t’entends dire : « Y’aura pas de prochain. » Vertige, tu n’arrives pas à croire que les mots ont réussi à passer ta bouche aujourd’hui, ils sont trop lourds pour toi. Tu l’entends ta voix mais elle t’a semblé si lointaine, si pleine de rejet - comme si tu avais tout rejeté en bloc, tout en une phrase, ta vie, ce spectacle, et sa main avec, comme une réaction allergique, comme tout ton être affrontant la surcharge. Tu te bloques sur place, dévies ton regard, incapable de soutenir le sien. « Je… J’arrête, j’en peux plus, je veux plus, j’y arrive plus. » Tu l’avoues et t’en as honte, t’en as profondément honte, à tel point que tu ressens le besoin de repousser sa main comme si elle t’accablait par son seul contact. « Je voulais t’en parler, j’avais pas prévu de le faire de cette façon, mais c’est dit : je laisse tomber. Dis-le tout de suite : est-ce que ça te pose un problème ? » L’angoisse avait chargé cette dernière phrase trop agressivement, au fond ça ne signifiait qu’une chose : tu avais besoin qu’on te soutienne en ce sens, tu avais profondément besoin de ce soutien parce que l’abandon de la seule chose que tu connaissais et que tu savais faire te faisait peur malgré tout. Surtout, tu avais peur de renoncer et revenir sur ta décision à la première désapprobation. Faute d’être capable d’asseoir ta volonté sous forme d’exigences, faute de savoir être ferme : tu te faisais brute, ça avait toujours été comme ça te concernant. Tu en avais même oublié le casse-dalle, mais la tension que tu venais de jeter dans l'air t'avait tordu les tripes trop fort pour que tu puisses avaler quoi que ce soit maintenant.

Spoiler:
Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé
Revenir en haut Aller en bas
 
I've got you brother | ft. Mortimer
Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Revenir en haut 
Page 1 sur 1
 Sujets similaires
-
» Mortimer McQueen - Brother, let me be your shelter
» Mortimer - We never found the answer, but we knew one thing

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
► URBAN LEGENDS :: Archives de UL V3 :: Ecrits-