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 Épistolaires Mondainités

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Épistolaires Mondainités
Eògan & Agatha




C'est un exercice nécessaire, mais auquel il déteste se plier.
Ils ont été prévenu plusieurs semaines en avance, et la nouvelle a été accueillie avec des réactions diverses. De la joie, de l'indifférence, de l'agacement.
Eògan est de ces derniers. Parader pendant des heures, se faire bien voir, jouer de sourires et de compliments pour obtenir les faveurs de la haute société, voilà une obligation dont il se passerait bien. D'autant plus qu'il a déjà prouvé à maintes reprises ne pas être doué pour la chose ! Toujours courtois, il manie certes le mépris avec élégance, mais dans ce milieu là, personne n'est dupe.
Appartient-il seulement à ce monde ? Sa réussite professionnelle lui a permis d'y accéder et d'ouvrir les portes d'un univers que sa famille n'aurait jamais rêvé effleurer du bout des doigts. Il fait partie de cette population plus qu'aisée, plus qu'à l'abri du besoin.
Il fait pourtant naturellement tache dans le décor. Son accent irlandais, ses cheveux roux, sa carrure de viking, tant de choses qui indiquent qu'il n'a pas le profil habituel des riches habitants de ce fortuné comté de Wicklow. Il a plutôt les caractéristiques de cette population opprimée pendant des siècles, envahie par diverses forces armées, mais qui a su rester fidèle à elle-même.
Rien à voir avec les milliardaires russes et autres aristocrates britanniques qui viennent ici pour le pittoresque de la région.

Le hall principal de l'hôpital est méconnaissable. Décorations, tables, buffets, tout a été repensé de façon à ce qu'on oublie où l'on se trouve. Gobelet de café brûlant à la main, cernes sous les yeux, blouse sur les épaules, Eògan observe silencieusement ce nouveau décor. Le service des urgences, desservi par sa propre entrée derrière l'hôpital, sera le seul à faire des entrées ce soir. Évidemment, il s'est porté volontaire pour être de garde : ce sera l'excuse idéale pour s'éclipser de la soirée. Qu'importe que ça lui fasse cumuler une nuit de folie avec une journée chargée, il y a gagne deux jours de repos, et une jolie prime.
Avec une grimace qui ne trompe personne, il passe entre les serveurs et traiteurs qui s'affairent pour que tout soit prêt à temps, car les invités arriveront d'une seconde à l'autre, direction les vestiaires.
Il n'aura pas le temps de rentrer chez lui. Mais rassurez-vous, il a tout prévu. La porte se ferme derrière lui, les jacasssements des vestiaires de femme lui parviennent. Il n'y prête pas attention et poursuit sa route jusqu'à son casier.
Une douche plus tard, il a troqué sa blouse de chirurgien contre un costard taillé sur mesure. Habillé sobrement, tout de noir avec une chemise blanche et un noeud papillon, montre automatique au poignet, cheveux tirés en arrière, il pousse un soupir devant la porte qui mène sur le lieu des mondainités.
Il faut trouver de nouveaux investisseurs ! avait scandé la direction de l'hôpital. L'argent public ne suffirait pas à faire tourner la machine. Tout le gratin de la région avait donc été invité, et on n'avait pas lésiné sur les moyens. Vin français, champagne millésimé, mets d'exception.
Il ne fallait surtout pas effaroucher qui que ce soit.
Une main se pose sur l'épaule du chirurgien. Une collègue du service de gériatrie. Visiblement pas plus enchantée que lui, elle lui adresse un sourire encourageant avant de se jeter dans le bain.
Nouveau soupir.
Son pouce gauche fait rouler son alliance autour de son annulaire.
Et il pousse la porte.

La lumière est assourdissante, les bavardages aveuglants.
Les rires sont dissonnants.
Tout sonne faux. Tout n'est qu'apparences et hypocrisie.
Il n'a qu'une envie : filer aux urgences, s'occuper des malchanceux de la nuit.
En une seconde, sans avoir le temps de comprendre ce qui lui tombe dessus que déjà il se retrouve avec une flûte de champagne à la main, tiré par le bras par un collègue de l'administration.
Ah, Doctor Wheelan ! I'm so happy to see you here, I was afraid you'd hide in the Emergency Departement !1 lui lance-t-on d'un ton badin.
Hahaha.
S'il savait…
Of course, you already know Mrs Egerton ?2
Ah, voici donc la manoeuvre. À peine lui a-t-on mis le grapin dessus qu'il faut qu'on lui colle dans les pattes la pire de tous leurs invités. Dans le genre aristocrate qui n'a pas compris que l'Irlande a gagné son indépendance il y a plus d'un siècle…
I do,3 répond laconiquement le chirurgien, sans un sourire ou une parole réellement avenante. Il faut dire qu'il préfèrerait encore aller faire la conversation aux patients du service de psychiatrie.
Et sans doute son collègue le sent-il, car il fait un dernier effort pour nouer la conversation…
I was just telling Mrs Egerton that our Emergency Department needs more skilled surgeons like you to be more efficient, what do you think ? 4
… avant de se laisser entraîner vers une autre conversation, un peu plus loin, et d'abandonner ces deux antagonistes seuls face l'un à l'autre.
Wee bastard.

_________________
1Ah, Docteur Wheelan ! Je suis content de vous voir, j'avais peur que vous ne vous cachiez aux urgences !
2Evidemment, vous connaissez Mme Egerton ?
3Oui.
4J'informais justement Mme Egerton que notre service des urgences aurait besoin de plus de talentueux chirurgiens dans votre genre, qu'en pensez-vous ?
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Cela faisait quelque temps maintenant qu'elle était installée à Bray et pourtant elle ne s'y faisait pas vraiment. Le séjour n'était pourtant pas tout à fait déplaisant, Agatha s'était vu réserver quelques bonnes surprises et voir son frère régulièrement suffisait à une grande partie de son bien être. Cependant Bray restait Bray. Une petite ville irlandaise en somme. Enfin une petite ville était peut-être mensonger. Le terme sous entendait qu'il ne s'y passait rien, qu'aucuns remous perturbaient son quotidien paisible. Ce qui était loin d'être le cas. Agatha le concédait sans mal. Bray talonnait de près Londres niveau affaire mouvementée et même du point de vue des événements à vrai dire. Être une place forte du surnaturelle donnait automatiquement du relief à une ville, aussi paumée soit-elle dans ces terres malheureuses qu'était ce ''pays'' qui se dénommait Irlande. Bray n'était pas Londres, certes, mais Agatha y trouvait quelque fois une source de divertissement tout de même. Elle aimait parfois penser, avec tout le détachement dont elle pouvait faire preuve, au chaos qui sommeillait dans cette ville et qui n'attendait qu'une seule chose : qu'on le réveille. L'aristocrate le sentait, il ne manquait qu'un petit quelque chose pour que la situation dégénère complètement. L'idée de Bray soufflée par des conflits ancestraux avait quelque chose de bien trop plaisant pour ne pas y réfléchir plus sérieusement.

Cependant Agatha était actuellement à dix milles lieux de ce genre de pensée. Dans une de ses plus belles robes, une pièce sophistiquée en soie noire, elle assistait avec un sourire amusée au caquetage incessant qui remplissait la salle où elle se trouvait. La plupart des conservations n'étaient qu'inepties mais certaines étaient tout de mêmes amusantes à écouter d'une oreille distraite. Les derniers ragots se mélangeant à l'étalage de l’orgueil de chacun des convives. Le fait qu'Agatha soit présente dans la soirée mondaine qu'avait organisé l’hôpital de Bray pour tenter de récolter des fonds ne tenait pas à grand-chose. Elle avait tout d'abord hésité en recevant l'invitation, elle avait pesé le pour et le contre avant de finalement se décider de s'y rendre. Côtoyer le gratin de Bray n'était guère flatteur pour sa vanité mais les mondanités lui rappelait que trop sa chère Londres pour qu'elle puisse les bouder. De plus elle s'était dit qu'un avec un peu de change elle allait recroiser cette très chère Evelynn. Elle regrettait un peu sa décision : aucune trace de la charmante blonde mais elle devait bien avouer que les irlandais avaient vu les choses en grand. L'ambiance et le standing des lieux n'étaient pas du tout désagréable.

Elle papillonnait de discussion en discussion, s'amusant de la vacuité de ses interlocuteurs, verre de champagne à la main et se régalant du ballet empressé des serveurs pour répondre aux désirs des fortunés peuplant la pièce de leur babillages. Tout se déroulait pour elle comme cela devait se dérouler. Un homme l’apostropha, lui parla de l'hôpital, du manque de moyen malgré l’excellence du service proposé. Elle fit mine d'écouter pour donner le change, donnant un sourire ou un hochement de tête compréhensif ou soupirant avec son interlocuteur sur ses malheurs dérisoires En vérité elle s'en fichait, cela ne la concernait guère : elle faisait partie de cette partie de la population qui ne se souciait guère des choses triviales comme l'état de la santé publique. Si jamais elle tombait malade, elle irait dans le privé auprès des meilleurs chirurgien. Alors qu'elle allait trouver une excuse pour laisser son interlocuteur celui-ci apostropha de nouveau quelqu'un. Un homme cette fois-ci et qui avait été, selon les dires de son camarade, l'objet de leur conversation. Sans doute. Elle se souvint qu'on lui avait vanté plusieurs fois les mérites de quelques hommes, des chirurgien brillant soit disant, au cour de la soirée. Agatha n'avait que faire des hommes faisant la fierté de la ville de Bray mais elle fit tout de même l'effort d'esquisser un nouveau sourire polie. Elle était d'humeur à jouer son rôle : elle représentait les Egerton ce soir. Son sourire se crispa quand elle reconnut le nouvel arrivant. Cet odieux irlandais était donc chirurgien. Quelle invraisemblance mais soit elle n'aillait pas d'esclandre. Ce n'était pas son genre de toute façon et qui sait cet homme allait peut-être l'amuser à ses dépends.

- Monsieur Wheelan cela faisait longtemps. Dit-elle un sourire de façade toujours afficher sur son visage tout en ne cachant pas un certains mépris. Je n'aurais jamais crus vous voir ici, à cette soirée pour être plus précise.
Elle porta la coupe de champagne à ses lèvres, son sourire devenant franchement narquois. Une soirée mondaine sans hypocrisie n'était pas une bonne soirée mondaine. Elle sentait que la situation allait remédier à cela plus vite qu'elle ne l'aurait crut.

- Vous êtes si, comment dire, Irlandais ? Elle laissa échapper un rire cristallin. Pardonnez moi mais vous détonnez tellement. A peine arriver et on ne remarque que vous.

Ce qui était résolument vrai. Il ne fallait pas être un génie pour comprendre que Wheelan n'appréciait pas l'ambiance de la soirée. La soirée tout court d'ailleurs. Ce dernier ne faisait qu'agrandir la bonne humeur d'Agatha. Mauvaise un jour, mauvaise toujours.
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